Il y a quelques semaines tombait une triste nouvelle : le meeting Flying Legends ne se tiendra plus à Duxford. Outre le plateau, ce show était légendaire (sans mauvais jeu de mot…) grâce à son environnement. En effet, il profitait pleinement d’un cadre exceptionnel : l’Imperial War Museum. Ce musée, dont l’annexe de Duxford représente le plus grand musée aéronautique anglais, s’articule autour de 7 bâtiments principaux. Presque 200 avions, des véhicules militaires, de l’artillerie, des petits navires de guerre… Une collection extraordinaire pour laquelle plusieurs articles seront nécessaires. Par conséquent, commençons aujourd’hui par l’un des ses plus récents bâtiment : l’American Air Museum.
L’American Air Museum
Inauguré le 1er août 1997 par la Reine Elisabeth II, ce bâtiment commémore la puissance aérienne américaine, notamment durant la Seconde Guerre Mondiale.
Ce projet remonte au milieu des années 1980. Comme toute idée de cette ampleur, il nécessita un certain temps pour collecter les fonds, réaliser les plans puis les travaux. Le cahier des charges prévoyait un bâtiment fournissant une toile de fond neutre. Des contrôles climatiques appropriés devaient de plus assurer sa rentabilité.
Réalisé par l’architecte Norman Foster, le projet fait référence à l’architecture high tech. Le Boeing B-52 Strato-Fortress déjà présent sur place sert de mètre-étalon pour dimensionner l’ensemble. Par exemple, la hauteur de la dérive dictera celle du bâtiment. De plus, au regard de l’étendue de la collection, des suspentes accueilleront certains avions afin de gagner de la place au sol.
Au final, le résultat présente une section de tore (tube recourbé fermé sur lui-même) de 5.700m². Il se compose essentiellement d’un toit en béton courbé (90ml x 100ml et hauteur de 18.50ml) et d’une paroi en verre démontable. Le toit pèse presque 6.000t et peut supporter des avions suspendus jusqu’à 10t. La paroi en verre donne de la luminosité et permet d’apprécier la collection de l’extérieur. Le Prix Stirling viendra récompenser ce projet en 1998.
Pour la visite, 2 approches s’offrent à vous. Vous pouvez d’abord déambuler au sol parmi les avions. Mais rapidement, vos pas vous guident vers les passages latéraux menant à une mezzanine. Cette dernière, située au niveau du cockpit du B-52, vous permet de mieux apprécier les différents avions. En outre, l’absence de colonnes de support est également un point très positif pour la vision globale du lieu.
Au final, la collection comporte une vingtaine d’avions, également répartis entre moteur à hélice et moteur à réaction. De nombreux accessoires (moteurs, etc.) et panneaux d’information complètent le tout et offrent une agréable immersion aux visiteurs.
Les chasseurs et avions d’entraînement à hélice
Le plus ancien d’entre eux est un Spad XIII, le seul avion d’origine française présent ici. Entrés tardivement dans le 1er conflit mondial, les USA n’avaient pas d’industrie apte à fournir de bons avions de chasse. Par conséquent, l’USAAS (l’Armée Américaine Air Service) s’équipa rapidement chez son allié français. Au total, les Spad équipèrent 15 de ses 16 escadrons opérationnels !
Des Boeing PT-17 Kaydet et North American Aviation T-6 Texan jouxtent le Spad. Ces types avions sont aisément visibles par chez nous car bien présents dans nos meetings aériens.
Puis 2 chasseurs emblématiques vous attendent, suspendus vers la paroi vitrée : les North American P-51 D Mustang et Republic P-47 D Thunderbolt. Le P-51, tout aluminium et équipé de ses inévitables réservoirs supplémentaires, représente la quintessence de l’escorte à longue distance de la fin de la guerre. Et le P-47, avec camouflage tactique et bandes d’invasion, reflète lui l’excellence des avions d’attaque au sol de la 9e Air Force à partir de juin 1944.
Les bombardiers à hélices
Parlons maintenant des bombardiers, très bien représentés ici. Un rare North American Aviation B-25 Mitchell de bombardement tactique (nez vitré) nous surplombe. Ainsi nommé en l’honneur du Général Mitchell, stratège aéronautique américain précurseur, il bombarda Tokyo en avril 1942, entrant ainsi dans la légende. En effet, cette mission devint symbolique car réussissant à porter le feu sur le territoire jusqu’alors inviolé du Japon. Cette mission fut d’autant plus surprenante que ces avions terrestres avaient décollé du pont d’un porte-avion ! Ce type de bombardier a par la suite équipé nombre de forces d’assaut tactiques des armées US et alliées.
Sous le B-25, un Boeing B-17 G Flying Fortress nous attend au sol. Equipé du très secret viseur de précision Norden, il fut le fer de lance de la campagne de bombardement stratégique sur le front européen. Très robuste et bien armé, il alla combattre frontalement la Luftwaffe et lui paya un lourd tribut.
Puis derrière le B-17 se trouve son frère d’arme : le Consolitated B-24 J Liberator. Plus récents, plus puissants, plus endurants, plus polyvalents, plus nombreux, mais plus fragiles que les B-17, les B-24 s’illustrèrent sur tous les fronts.
De l’autre côté de la salle sont disposés 2 avions historiques : un Douglas C-47 Skytrain surplombant un Boeing B-29 Super Fortress.
Suspendu, voici le C-47, qualifié par le Général Eisenhower de “vital pour l’effort de guerre”. Avion-cargo le plus répandu de WW2, extrapolé du DC-3 civil, des exemplaires sont toujours opérationnels dans certaines armées et compagnies aériennes ! Cet appareil en particulier a volé avec le 316th Troop Carrier Group. Sa participation à 3 opérations majeures aéroportées est avérée : le Débarquement de Normandie et les opérations Market Garden (franchissement du Rhin aux Pays-Bas en septembre 44) et Varsity (franchissement du Rhin en Allemagne en mars 45).
En-dessous se tient le B-29, combattant du Pacifique puis de la Corée du Nord. Porteur de l’arme atomique, il a participé aux raids massifs contre le Japon et a ensuite retrouvé les combats en Corée. L’exemplaire exposé est le seul de son type en Europe, et l’un des 2 seuls conservés dans des musées en dehors des USA.
Des jets impressionnants et peu courants
Nous l’avons mentionné précédemment : le bâtiment est dimensionné autour de son Boeing B-52 Strato-Fortress. Il est inévitable ! N’ayant pas d’objectif grand-angle sous la main, vous serez obligé de le recomposer à partir de plusieurs points de vue ! Ce bombardier octo-réacteur est inusable ! Le 1er vol se déroula en 1952, ce qui n’empêchera pas ses dernières versions de durer jusqu’à 2040 ! L’appareil exposé ici est représentatif de ceux qui bombardaient le Vietnam dans les années 90.
Sur son côté droit stationne un Republic A-10 Thunderbolt II suspendu au-dessus d’un General Dynamic F-111 Aardvark. Le 1er vole toujours en action au sein de l’USAF, inégalable pour fournir un appui aérien rapproché aux Marines. Construit autour de son canon de 30mm surpuissant, il est ici vu dans un camouflage européen, remplacé depuis par une livrée grise dite “basse visibilité”.
En ce qui concerne le F-111, le retrait de service a sonné en 1998 aux USA, et 2010 pour l’Australie. Il exista sous 3 variantes principales : F-111 d’assaut tout temps, FB-111 de bombardement stratégique et EF-111 de guerre électronique. Il est remarquable au niveau de sa conception : biplace côte-à-côte et géométrie variable. Cette dernière est visible avec sa flèche maximale, ce qui lui donne une allure très impressionnante. L’exemplaire exposé ici a participé à la Guerre du Golfe, durant laquelle il réalisa 19 missions. C’est véritablement un avion rare à observer, et d’une taille impressionnante. Dire qu’il a été imaginé un temps que sa version -B aurait pu devenir le chasseur standard de l’US Navy !
Derrière le A-10 se cache l’avion-espion Lockheed U-2. Actif depuis 1956, capable d’atteindre des altitudes supérieures à 21 000m, il fut longtemps un espion intouchable sur tout le globe. Mais l’URSS ayant réussi à en abattre un exemplaire en 1960, il dut être amélioré et secondé dans ses œuvres par son successeur : le SR-71.
Et justement, le voici ce Lockheed SR-71 Blackbird trisonique. Il défricha les très hautes vitesses et se frotta au fameux “mur de la chaleur”. Ce dernier avait un tel impact que la dilatation anticipée du revêtement imposait que l’avion soit une vraie passoire au sol, fuyant de partout. Le modèle exposé ici est le seul situé en-dehors des USA. Il a de plus établi un record du monde d’altitude en juillet 1976 en atteignant l’altitude de 25 029m.
Surplombant le Boeing B-52, un Mc Donnell Douglas F-15 Eagle monte la garde. Avion de supériorité aérienne ayant réalisé son 1er vol en 1972, il est encore à l’heure actuelle invaincu en combat aérien. Et ce type d’avion n’est pas prêt de quitter les cieux : les USA viennent d’en commander la dernière version : le F-15 EX… quelle longévité !
Enfin, impossible de ne pas mentionner le Mc Donnell Douglas F-4 Phantom II. Contemporain du B-52 au-dessus des jungles du Vietnam, il fut l’un des 1ers avions de chasse multi-rôle et vola sous de nombreuses cocardes. Il a de plus le rare privilège d’avoir équipé l’USAF et l’US Navy, 2 institutions qui généralement préfèrent avoir leurs propres modèles…
Une visite incontournable…
Bref, vous l’aurez compris… Inutile de prétexter que Flying Legends ne se tiendra plus à Duxford pour ne pas aller visiter ce coin de campagne proche de Cambridge. La qualité des collections est telle que tout amateur d’aviation ne pourra être déçu…