A400M au décollage.Crédit photos: PE Langenfeld |
Samedi, peu avant 13 heures, un Airbus A400M s’est écrasé dans un champ, moins de 5 minutes après son décollage. 4 des 6 membres d’équipages sont décédés dans l’accident, et deux autres, sauvés des flammes par des agriculteurs courageux, sont dans un état grave, mais stable.
Au-delà du drame humain, et bien qu’un crash ne soit jamais une bonne nouvelle, celui-ci arrive à un très mauvais moment, alors qu’Airbus Defense & Space, dans la tourmente sur ce programme, tentait de satisfaire ses clients après de nombreux écueils révélés ces derniers mois.
A propos de l’accident, nous ne savons pas grand-chose. Simplement que l’équipage a signalé un incident juste après le décollage, puis a demandé à retourner à son point de départ deux minutes plus tard. Il aurait ensuite annoncé qu’il ne pourrait pas revenir sur la piste indiquée par les contrôleurs. Quelques secondes après, l’avion percutera des lignes haute tensions avant de s’écraser dans un champ.
Certains médias auraient avancé un problème sur les volets et les trains d’atterrissage, ce qui a permis à Jean Marc Tanguy d’avancer l’hypothèse d’un problème hydraulique. Mais ne sachant pas quelle est la source de l’information, et connaissant le “sérieux” des médias dans ce genre d’événements, en voulant créer du buzz à tout prix, au risque de diffuser trop rapidement des informations non vérifiées, mieux vaut raison garder et attendre, à minima, un premier rapport préliminaire d’enquête. Car les équipes d’investigations seront mises sous pression, tant les enjeux sont importants. Les boites noires ayant été retrouvées très rapidement, nul doute que les enquêteurs sont à pied d’oeuvre, avec déjà une nuit blanche au compteur… Car il faudra très rapidement répondre à certaines questions urgentes. D’où provient le problème ? Etait il lié à un défaut de cet appareil, d’industrialisation ou de conception ? La collision avec les lignes électriques a-t-elle été la cause de l’extrême gravité de ce crash ?
Un avion flambant neuf
L’avion qui s’est écrasé était le MSN23. Il était le troisième exemplaire destiné à l’armée de l’air Turque, qui en a commandé 10. L’avion venait de sortir de la chaîne d’assemblage finale de Seville et subissait des essais en vol, étape nécessaire afin de vérifier la conformité de l’avion avant la livraison, et de son acceptation par le client. C’est une étape commune à tous les avions fabriqués dans le monde, faisant parti du processus qualité de chaque constructeur… Processus récemment en cours de refonte chez Airbus Defense & Space, tant le nombre de défauts (mineurs pour la plupart), ont été constatés par les clients. La Turquie avait notamment fait patienter Airbus de nombreuses semaines avant de prendre en compte son premier appareil, qui attendait, neuf, sur les parkings de Séville. Mais plus qu’un problème d’ordre technique, il s’agissait, selon les fuites, de négociations ardues menées par les turques pour obtenir un maximum de concessions de la part d’Airbus.
Les clients dans l’attente.
Sur les 174 A400M commandés, 12 ont déjà été livrés, dont la moitié à l’Armée de l’Air française, qui a reçu son premier exemplaire en 2013. Le MSN 23 qui vient de s’écraser était le 16 ème appareil de série produit, les six premiers étant des prototypes destinés aux essais en vol.
Par mesure de précaution, une grande majorité des pays clients ont cloués leurs appareils au sol, le temps de l’enquête. C’est une réponse logique, faisant appel au principe de précaution. Seule l’Armée de l’Air n’a pas été dans ce sens, et a restreint l’utilisation de ses avions aux missions prioritaires.
Comme détaillé dans ce post du blog Lemamouth, l’Armée de l’Air compte actuellement sur une petite vingtaine d’appareils de transport tactiques.
Les Atlas, arrivés il y a peu, et bien que l’ensemble du spectre de leurs capacités ne sont pas encore disponibles, ont déjà effectués de nombreuses missions de transport.Les opérations Barkhane au Sahel et Chammal en Irak, puis les bases aériennes éloignées du territoire telles en Guyane française ou à la Réunion dans l’Océan indiens sollicitent énormément la logistique des armées. Ce que l’Atlas fait aujourd’hui, les anciens moyens de l’armée de l’air ne pouvaient pas le faire, comme transporter un hélicoptère en Guyane via un vol direct par exemple, ou alors beaucoup plus difficilement. Mis à part pour le transport de palettes standards, où la France pouvait compter sur les 2 A340 ou les C-135FR par ailleurs fortement sollicités pour le ravitaillement en vol et déjà très insuffisant en nombre, et dont l’âge très avancé nuit à leur disponibilité, le volume de la soute, la vitesse de croisière (double de celle d’un C130), et la charge utile de l’Atlas sont devenus indispensable !
Ce qui n’est pas le cas actuellement chez les autres clients. Les autres pays n’ont pas reçu plus de deux appareils, et le Royaume Unis dispose de C-17 et de C-130 en nombre suffisant. L’Allemagne de son côté, n’a reçu qu’un seul exemplaire et son armée n’est pas fortement engagée.
Ce qui fait que dans l’attente, autant Airbus que l’Armée de l’Air tentent de tempérer… Le premier pour ne pas que des conclusions trop hâtives ne jettent encore de l’huile sur le feu sur un programme qui a du mal à faire oublier ses retards et surcoûts, et la seconde, pour justifier de l’emploi de ces appareils, alors que les autres armées ont pris des mesures immédiates.
2 Comments
GA_U
Hommage aux disparus, et soutien aux blessés et aux familles.
"Mais plus qu'un problème d'ordre technique, il s'agissait, selon les fuites" Il ne manque pas la fin de la phrase ?
Bruno ETCHENIC
Effectivement, petit soucis de copier/coller. Merci pour nous l'avoir signalé.