Un communiqué de presse de la Délégation Générale pour l’Armement (DGA) nous apprend qu’il y a deux jours, le mardi 28 avril, le Rafale a effectué son premier tir du missile longue portée Meteor.
Ce tir s’inscrit dans la continuité des essais, dont ceux en vol, visant à intégrer le missile sur le Rafale, dans le cadre de la future mise à jour majeure de l’avion, le standard F3R.
En novembre 2012 déjà, soit presque un an avant la signature du contrat du développement du standard, le Rafale avait déjà effectué une campagne d’essais, visant à valider la séparation, ou plutôt l’éjection de missiles de son porteur. Il s’agit en effet de valider que les contraintes physiques et aérodynamiques soient compatibles, et que le missile ne percute pas son porteur une fois largué.
Comme à leur habitude, les essais de munition sont réalisés par la DGA EV (essais en vol), situé au large des côtes landaises. Le Rafale, un biplace de l’armée de l’air, a effectué ce tir en se servant de ses propres systèmes embarqués pour acquérir et guider la cible.
Éjection (noter les vérins) du Meteor de son point d’emport |
Lorsque le Rafale au standard F3R entrera en service, normalement en 2018, le Meteor apportera une amélioration sensible aux capacités de combat aériennes du Rafale. Avec une portée largement améliorée par rapport au Mica qu’il va compléter, c’est son mode de propulsion qui apportera un véritable plus. D’une portée théorique de 60 km pour le Mica, elle sera portée à plus de 100 km pour le Meteor, et ceci grâce à son mode de propulsion par statoréacteur.
Les missiles air-air sont généralement équipés de moteurs à poudre qui donnent un maximum de puissance pendant un laps de temps très court, ceci afin de répondre à deux objectifs. Plus la puissance initiale sera importante, plus l’énergie le sera, et le missile obtiendra une plus grande portée. Revers de la médaille, la flamme dégagée par le moteur fusée est caractéristique à chaque missile, et peut se faire repérer de très loin, donnant ainsi à l’adversaire un signal qui lui permettra d’anticiper une manœuvre d’évitement ou une riposte, d’où l’importance d’un temps de propulsion le plus court possible.
Ensuite, le missile décrit une trajectoire balistique jusqu’à la position estimée de la cible, sans aucune propulsion. Ainsi, si le missile est tiré de loin, et que le time to target est estimé à 40 secondes, et en estimant que la cible suit une trajectoire rectiligne à une vitesse de 1000 km/h, alors la trajectoire calculée du missile lui fera rejoindre un point de rencontre fictif situé à 11 km de la cible au moment du tir. Là est toute la complexité du combat aérien à longue distance. Un brusque changement de trajectoire de la cible, et le missile doit viser un point beaucoup plus loin… rentre en considération le rafraichissement de la position de la cible via une liaison avion/missile, et d’autres indications de performance comme la NEZ (No Escape Zone), cercle virtuel létal dans lequel l’adversaire ne pourra se soustraire à la volonté du missile de vouloir lui faire du… Rentre dedans.
Avec la technologie du statoréacteur, qui nécessite toutefois une poussée initiale afin que le moteur puisse fonctionner, l’énergie reste constante tout le long du vol du missile. Ainsi, la fameuse NEZ s’accroît exponentiellement, et le missile ne craint plus un brusque changement de trajectoire qui lui ferait trop fortement réduire son énergie.
Ainsi équipé, le Rafale, avec son radar à antenne électronique active (AESA) deviendra un adversaire extrêmement dangereux pour tous ses adversaires potentiels.
Conçu par le missilier européen MBDA, le Meteor équipera également le Gripen de Saab, et l’Eurofighter Typhoon européen.
10 Comments
Buddy Spike
Ne manque plus qu'un viseur de casque (les Indiens en demandent un, Dash ou Topsight) et il sera parfait.
Chrisalain
Merci pour ces précisions très intéressantes sur l'avantage que procure, à un missile air-air, le statoréacteur.
Et… longue vie au Rafale !!!
sepecat
NEZitez pas à nous donner en pature de tels articles…
Etre informé de l'emploi d'un statoréacteur sur un missile est une chose, se le faire expliquer de façon synthétique en est une autre.
Pari réussi.
La fameuse NEZ en devient bien concrète et nous permet de mieux cerner à présent en quoi cette nouvelle génération d'armement apporte une supériorité évidente en général, au Rafale en particulier.
Le propre des systèmes d'armes est d'évoluer et s'améliorer dans le temps, au fur et à mesure des standards, blocks ou autres classifications, mais le Rafale semble réellement se bonifier et maintenir un niveau élevé de qualification.
Anonyme
AIM-120D (missile américain) à une porté de 160 km (cf Wikipedia). Alors c'est quoi le mieux ? La porté ou le NEZ ? D'après cette article le NEZ du meteor est 3 fois plus grand que celui du AIM-120D et ce dernier possède une pk de 11٪ https://defenseissues.wordpress.com/2012/12/15/aim-120d-vs-mbda-meteor/
Les simulations de combat aériens présent telles en compte ce facteur ou c'est juste le premier qui tire qui gagne ?
Bruno ETCHENIC
Le combat aérien est plus affaire de tactique et de maitrise de l'environnement que de performances pures. Bien entendu que celui qui tire en premier possède un avantage, mais pas forcément. Avec les Fox 1 par exemple, et l'usage de la manoeuvre de crank, celui qui était la cible pouvait assez facilement se mettre en position de tireur, tout en épuisant l'énergie du missile assaillant.
En combat aérien, c'est celui qui a une fine connaissance de la bulle tactique dans lequel il évolue qui a un avantage… De ce point de vue là, le Rafale et la fusion des données présentée au pilote de façon synthétique donne au pilote un très net avantage. Bien avant la portée du missile ou la vitesse de son porteur.
Anonyme
Bonjour,
Merci beaucoup pour ces excellentes précision ! Alors la porté du radar du rafale qui est tant critiqué par rapport à ses concurrents n'est pas si importante que ça ? Ce serait plutôt la tactique du pilote et le spectra qui feraiet la différence en l'air ?
Niviuk
Bruno ETCHENIC
La portée du rbe2 pesa était en deçà des performances de portée par rapport à ses concurrents il est vrai. Mais c'était un radar intermédiaire qui préfigurait le rbe2 Aesa a antenne active qui, lui n'a rien à envier à ses concurrents. Il est en service depuis l'année dernière sur les rafale livrés neuf depuis fin 2013.
James
Je voudrais ajouter que le radar du Rafale doit assurer 2 fonctions principales qui sont le A/A (comme ses concurrents) mais aussi du suivi de terrain en basses altitudes comme le Mirage 2000 N (ou D). D'où peut-être ce relatif manque de portée du PESA, suivant la technologie disponible à l'époque.
Bruno ETCHENIC
L'AESA était vraiment la cible des ingénieurs. Le développement du PESA a permis au Rafale de disposer d'un radar ultra agile et véritablement multimode, faisant de l'air sol aussi bien que de l'air/air, au prix d'une portée moindre. Mais il suffit au Rafale de changer d'antenne pour voir sa portée plus que doublée. Alors que Gripen ou Typhoon doivent changer de Radar complet, et au passage de refaire tous une partie de leurs logiciels embarqués…
James
Oui, PESA et AESA interchangeables, avec juste une alim un peu plus costaude pour l'AESA!