Après l’incroyable aventure d’Y.G. qui nous a raconté son immersion à bord de l’USS Ronald Reagan, il nous livre aujourd’hui un récit d’une autre partie de son périple américain. Sa découverte d’un des plus incroyable meeting de la planète, lors de son édition 2014.
Les photos illustrant cet article ont été prises pas notre photographe Pierre Etienne Langenfeld qui a pu s’y rendre en 2012. Retrouvez toutes ses photo sur son site www.langenfeld.fr
OSHKOSH 2014
EAA : « The Spirit of Aviation »
Ou 2 jours au « Paradis des pilotes »
Lors du cocktail de fin du fameux meeting aérien de Mainfonds (16250) en août 2013, Christophe me demande si je veux retourner à Oshkosh. A ma réponse affirmative il ajoute la visite de San Diego et de Chicago pour nos amis Martine et Alain qui s’associent au voyage. Je pose mes conditions : je souhaite aller assister à une course d’avions à Reno (Nevada) et à un rodéo, n’importe où…
Beaucoup d’avions, beaucoup de monde, beaucoup d’effets spéciaux, bienvenue aux states !
Comme il y a deux ans pour notre voyage à Oshkosh, Chicago et New York, Christophe s’occupe de tout : réservations des vols, des hôtels, des chambres d’hôtes et des entrées à Oshkosh. Mais là, il faut ajouter Hawaï où nous aurons l’immense privilège de passer 24 heures sur un porte-avions américain avec appontage et catapultage ! Comme je n’ai pas l’intention de dépasser les trois semaines que je me suis fixées pour mon voyage et que les rodéos n’ont lieu qu’en hiver, nous nous limitons à Hawaï, San Diego, Las Vegas, Chicago et Oshkosh, 3 ou 4 jours à chaque étape ! Que demande le peuple ?
Pour Oshkosh, le « Paradis des pilotes », il faut être accrédité par un journal pour bénéficier des avantages accordés aux 900 (917 cette année pour être précis) collaborateurs de journaux, magazines ou autres télévisions du monde entier par le Media Center de la manifestation. En 2012, Christophe et moi l’étions par Air Fan, mensuel bien connu du monde français de l’aéronautique. Mais pour un magazine ou un journal, seuls deux correspondants sont acceptés. Et nous sommes quatre à faire le voyage. Christophe et Martine obtiennent l’accréditation du rédacteur en chef d’Air Fan. Pour Alain et moi, il faut trouver un autre journal. J’en approche deux ou trois qui ne sont pas intéressés par un reportage sur cette manifestation unique au monde puisqu’elle représente plus de dix fois le meeting de « La Ferté Alais » organisé à la Pentecôte, chaque année, par l’Amicale Jean-Baptiste Salis… Et pourtant, en une semaine, généralement la dernière du mois de juillet, 500 000 personnes défilent sur le site, plus de 10 000 aéronefs y passent dont 2 500 qui sont présentés en vol ! Les industriels ayant un rapport quelconque avec l’aéronautique ne s’y trompent pas qui viennent en force… 800 exposants sont présents !
Mais au fait, Oshkosh, c’est quoi ? Pourquoi le « Paradis des pilotes » ? Pourquoi autant de médias et d’industriels se bousculent pour y participer ? Pourquoi un journal régional comme le « P’tit Cagouillard », journal gratuit distribué sur le Périgord et une partie du grand sud-ouest, a-t-il accepté de nous accréditer, Alain et moi ? Merci en passant à Jocelyne, la rédactrice en chef.
En fait il faut parler d’ « EAA AirVenture Oshkosh » ou « Experimental Aviation Association AirVenture Oshkosh » qui s’appelait à l’origine « EAA Annual Convention and Fly-In ». Paul Howard Poberezny, né le 14 septembre 1921 au Kansas l’a fondée en 1953 à Milwaukee (Wisconsin). Paul a été pendant 30 ans pilote de chasse dans l’US Air Force. Il a participé à la deuxième guerre mondiale et à la guerre de Corée. Il quitte l’armée à l’âge de 50 ans avec le grade de lieutenant-colonel. Il a 32 ans quand il fonde l’EAA Annual Convention et il est encore en activité. L’armistice signé le 27 juillet 1953 à Panmunjom vient de mettre fin à la guerre de Corée. Paul est aussi passionné par la construction d’avions et leur expérimentation… Il a quitté ce monde pour la « salle de repos éternel des pilotes » le 22 août 2013, à presque 92 ans, avec plus de 30 000 heures de vol sur 500 types d’avions différents !
De 1960 à1969, l’EAA a été transférée à Rockford, dans l’Illinois (état situé au sud du Wisconsin, dont la capitale est Springfield et dont la ville principale est Chicago, 3ème ville des USA par sa population, en bordure du Lac Michigan). Depuis 1970, cet événement majeur, « temple de l’aviation », se déroule tout les étés, pendant une semaine, à la fin du mois de juillet. Les 500 000 visiteurs que j’évoquais plus haut rejoignent le site à pied, à cheval (non, je n’en ai pas vu), en voiture, en camping-cars… ou en avion. Les 5 à 10 000 aéronefs sont parqués sur 750 acres (300 hectares) (1), entre les quatre pistes principales, les 18/36 (de 2,439 kilomètres de long) et les 09/27 (il y a quatre autres pistes rarement utilisées : les 04/22 et 13/31 d’environ 1 km de long). Les propriétaires des « petits avions » comme les Cessna 172 ou les Piper Cub J3 plantent leurs tentes canadiennes ou igloos sous l’aile de leurs « oiseaux » ! Les plus fortunés, propriétaires de North American P 51 Mustang, (d’un coût unitaire de 39 000 € en 1945 et qui se négocie à plus de 5 M€ aujourd’hui), viennent à leur avion en Ford Mustang, comble du snobisme car, évidemment, ils ne plantent pas de tente canadienne, eux !
Mais revenons à des choses plus terre-à-terre, à savoir notre aventure de deux jours à l’AirVenture !
Ayant eu la chance de passer 24 heures sur un porte-avions américain au large de Oahu, une des îles Hawaï, nous rejoignons Oshkosh via San Diego, Las Vegas et Chicago ! A Las Vegas, raisonnables, nous n’avons pas grevé notre budget en descendant l’unique bras des « bandits manchots » des casinos (2). Cela nous permet de payer notre chambre de l’hôtel de Chicago et surtout nos chambres d’hôtes de chez Jerry, situées à Oshkosh, dans la rue Hubbard, laquelle mène à l’entrée de Wittman Regional Airport, de l’autre côté des pistes, à 3,9 km de l’entrée principale d’EAA AirVenture. Beaucoup plus près toutefois de tous les hôtels du coin qui étaient d’ailleurs pleins depuis au moins six mois !
Avant de quitter Chicago pour Oshkosh, en ce lundi 28 juillet, nous devons louer une voiture car il y a la bagatelle de 260 km à parcourir pour relier la plus grande ville de l’Illinois à Oshkosh ! Alain a réservé une Jeep Cherokee chez Europcar avant de quitter la France. Le problème est qu’Europcar, personne ne connait à O’Hare, l’aéroport de Chicago. Alain et Martine, puis Christophe et moi quelques minutes plus tard, avons été conduits à O’Hare par les navettes de nos hôtels respectifs, pensant que les agences de location de véhicules étaient proches de l’aérogare, comme dans tout aéroport au monde ! A Chicago, ce n’est pas le cas. Les bureaux et les parkings des Hertz, Budget, Enterprise et autre Avis sont situés à au moins 10 kilomètres de l’aérogare principale et ces sociétés conduisent leurs clients d’O’Hare à leurs voitures par navettes qu’il faut prendre à proximité de l’arrivée des vols. Au bout d’une demi-heure que nous avons perdue à rechercher notre agence de location, nous apprenons que c’est la société Advantage qui gère les clients d’Europcar ! Et les navettes de cette société sont moins nombreuses que celles des autres. Au bout d’une heure, ayant enfin trouvé un bus-navette d’Advantage nous rejoignons Martine et Alain au bureau de la société de location. Notre voiture, une Jeep Cherokee noire immatriculée dans le Minnesota (l’état des 10 000 lacs) « 750 NHB » est bien là mais il faut ajouter un conducteur sur le contrat, votre serviteur, d’autant que je serai le seul à conduire pendant notre séjour dans l’Illinois et le Wisconsin, Alain n’aimant pas les « voitures à pédales » (3)…
… A midi et demi nous quittons la société Advantage en proche banlieue de Chicago avec la ferme intention de sortir de l’agglomération avant de nous arrêter pour déjeuner, l’estomac de Christophe commençant à gargouiller… A 13h15, l’ « Olive Garden », au nord de Chicago sur la route de Milwaukee, nous propose un déjeuner à l’Italienne qui ravit nos papilles, comparé à ce que les divers restaurants fréquentés jusque-là nous ont offerts. Il m’en coûte 25$ avec le quart d’une bouteille de vin de Californie que nous nous partageons… et le pourboire, obligatoire aux USA, représentant de 15 à 25 % sur le prix hors taxe. A 14h40, après un déjeuner correct, nous reprenons les routes I 294 puis I 94 (« I » pour Interstate) en direction du nord. Nous quittons l’I 94 à la sortie 317 pour emprunter l’I 43 vers Fond du Lac (en français dans le texte), à l’extrémité sud du lac Winnebago, puis les US 45 et 41 pour arriver au sud de l’aéroport d’Oshkosh (4) à 17h00. Passant non loin de chez Jerry, notre hôte, et ne sachant pas très bien retrouver l’entrée de l’EAA AirVenture et surtout le « Media Center Check In » où nous devons récupérer nos laissez-passer avant sa fermeture à 18h00, nous décidons de nous arrêter chez Jerry, célibataire endurci de 72 ans, pour lui demander de nous conduire à la « Main Gate ».
A 17h15, je parque notre Cherokee devant chez lui. Il ne nous reste que trois quarts d’heure avant la fermeture du Media Center Check-In mais Jerry tiens absolument à nous montrer nos chambres. Avec le doigté que vous me connaissez, j’insiste pour que cette visite soit la plus courte possible. A 17h35, enfin, Jerry nous guide vers la Main Gate, avec sa Buick hors d’âge et Christophe à ses côtés. Heureusement nous trouvons tout de suite le bureau recherché devant lequel nous nous garons à 17h50 ! Ouf ! Nos quatre laissez-passer sont prêts et nous avons droit à un dossier complet chacun, à un bracelet impossible à retirer même pour prendre une douche et un badge d’accès au parking B, le plus près de la tour de contrôle, pour notre Cherokee. Nous nous sentons mieux. Il nous est annoncé qu’un briefing au profit des médias se tiendra le lendemain au Media Center à 8h45.
Rasséréné je reconduis Martine et Alain chez Jerry qui m’ouvre la route avec son antiquité, Christophe encore à ses côtés. A 18h30 nous est proposé un deuxième tour de la propriété avec ses particularités, notamment la marche à suivre pour rentrer quand Jerry n’est pas là. La maison de Jerry à Oshkosh est en fait celle de sa mère, décédée deux ans plus tôt. Il loue les trois chambres depuis. Une à deux lits de 120 au rez-de-chaussée, une autre à un lit de 90 en face et une à un lit de 140 et un de 120 en sous-sol. Et lui, qui habite habituellement à Chicago, couche dans le salon sur un canapé ! Mais il ne l’use pas car il dort peu, selon lui. Il se couche vers une heure du matin pour se lever à cinq ! Je vous avoue ne pas avoir vérifié mais je peux vous assurer que lorsque nous rentrions vers 22h30, il était devant son téléviseur, et le matin quand je me réveillais, à 6h00, il était déjà dans son fauteuil en lisant son journal, après avoir préparé notre petit-déjeuner.
A 20h15, avec l’aide de la Gourde, américaine, qui Parle Seule, et dit souvent des conn…le GPS quoi, nous arrivons à un fast food déjà bien rempli et bruyant où il nous est annoncé une attente de vingt-cinq minutes avant de passer à table. Christophe ne veut pas attendre… et le bruit le repousse ! Martine, Alain et moi, un peu énervés par le temps perdu à tourner en rond pour trouver ce restaurant, font grise mine mais acceptent de chercher ailleurs. On se refait un bon quart d’heure de Cherokee pour aboutir à 20h30 à un « Applebee’s », dont nous avions apprécié le menu à Las Vegas. Cinq minutes d’attente de plus que pour le premier et autant de bruit !… Un ange passe !
… Retour à Hubbard Street dès 22h00 pour une demi-heure à regarder une des huit chaines de télévision accessibles (sur les 80 possibles) que les trois téléviseurs antédiluviens de la mère de Jerry peuvent capter…gracieusement, puis après, dodo !
… A 7h30, petit-déjeuner fait de céréales, de « Biscotti », de toasts, de « bagels », avec beurre et confiture, café ou thé au lait, tout ça préparé dès l’aube par notre hôte septuagénaire. A 8h30, départ pour l’EAA AirVenture pour être à l’heure au briefing de Dick, responsable des médias, annoncé la veille. Malgré les 4 kilomètres séparant la maison de Jerry du parking B et du Media Center, nous n’arrivons qu’à 9h09 freiné par un trafic déjà très dense ! Le parking est déjà bien rempli car le site est ouvert depuis 7h00. Comme nous sommes bien élevés, nous ne dérangeons pas Dick et restons dehors. A défaut de « briefing média », nous allons au centre météorologique pour voir à quel temps nous aurons à faire le mardi 29 et le mercredi 30 juillet, les deux seuls jours que nous avons décidé de passer à Oshkosh sur les sept que dure la manifestation. De 10h00 à 10h30 nous allons faire des emplettes au « EAA Merchandise » où tout est en solde ! C’est un des nombreux magasins du site où l’on peut trouver tee-shirts, polos, shorts, casquettes, panta-courts et pantalons, la plupart recouverts d’avions, et une multitude de jouets et peluches « aéronautiques ».
Mais les avions, me direz-vous, où sont-ils ? Je vous l’ai dit, il y en a des milliers ! Nous empruntons un « tram » de la ligne rouge (5) pour nous rendre aux « War Birds », à l’extrémité nord du site. Et là, messieurs dames, quel spectacle ! La plupart sont des chasseurs américains de la seconde guerre mondiale. J’ai compté pas moins de douze North American P 51 Mustangs ! Mais il y a aussi un ou deux Curtiss P 40 « Warhawk », deux Lockheed P 38 « Lightning », un Grumman F 6 « Hellcat », trois Supermarine « Spitfire », deux Chance Vought F 4 U « Corsair », un Grumman TBM « Avenger », copie de celui sur lequel George W. Bush (le père) a participé à la guerre du Pacifique… Sans oublier les « Dakota » ou leur version militaire C 47, les bombardiers B 17 et les célèbres North American B 25 « Mitchell » avec lequel le Colonel Doolittle et ses équipiers ont attaqué Tokyo le 18 avril 1942 en décollant dans des conditions limites du porte-avions USS Hornet.
De l’après-guerre, on peut admirer une bonne vingtaine de North American T 28 « Trojan », autant de North American T 6 « Texan », une demi-douzaine de Douglas A1 « Skyraider », et une bonne dizaine de Piper « Cub » J 3, qui devaient être noyés parmi la centaine de ce type que nous avons vue en 2012 lors du 70ème anniversaire de cet avion d’observation, et j’en passe… Et je passe, je veux dire nous passons une bonne heure à tourner autour de toutes ces merveilles et quand je dis « tourner autour », c’est vraiment très près, parfois même alors que les 2000 ou 3000 ch des Pratt and Whitney et des Rolls-Royce Merlin ont commencé à se faire entendre ! Là seulement une poignée de « Volunteers » vous prient de vous écarter juste assez pour laisser rouler ces avions qui sont alors présentés en vol ! Car la grande majorité de ces bijoux vole ! C’est extraordinaire !! Là me revient à l’esprit la célèbre intervention télévisuelle de Thierry Roland lors de la victoire de l’équipe de France de football le 12 juillet 1998, en finale de la Coupe du Monde : « Après avoir vu ça, pu…, on peut mourir tranquille ! ».
Rassasiés, temporairement, de ce spectacle, nous nous installons dans les gradins d’un théâtre de plein air pour assister à une conférence sur la vie du Colonel Clarence Emil « Bud » Anderson, ancien du 357th Fighter Group, âgé de 92 ans et présent parmi nous ! Cette conférence est faite sous forme d’un film « monté » par un réalisateur mandaté par l’EAA. Ce documentaire retrace la vie de ce « Veteran » de la 2ème guerre mondiale de son enfance jusqu’à ces dernières années en insistant, bien évidemment, sur ses 166 missions de guerre et ses 16 victoires aériennes ! « Bud » est mis à l’honneur, bien sûr, mais au travers lui l’US Air Force aussi… C’est un hommage à un vétéran comme il y en a tant d’autres. Car aux Etats-Unis, les vétérans, y compris ceux ayant participé à cette si controversée guerre du Viet Nam, sont respectés par tout le monde, de l’octogénaire au plus jeune des bambins parcourant le site. Je me suis même fait un plaisir en saluant respectueusement ce vénérable colonel, une casquette de « Desert Storm Veteran » sur la tête. Je peux aussi vous dire qu’au cours de la journée, plusieurs personnes m’ont présenté leurs respects en me voyant coiffé ainsi !! Je n’imagine pas çà en France, même à la Pentecôte, au meeting de La Ferté Alais… Dommage !
Ce trop long séjour à la « Fighter Town » (Ville des pilotes de chasse) nous fait arriver à 12h50 au Media Center où l’on nous apprend qu’il n’est plus servi de repas ! Je vois la tête de Christophe passer du teint bronzé au vert… Les restaurants ne manquent pas autour mais ils ne sont pas gratuits, eux ! Et soit dit entre nous, c’est du style Mac Do… que j’abhorre !
A 14h00, je vais écouter la présentation faite par une jeune femme sur un système anti-boucle de masse pour roulette de queue. Très honnêtement, ce n’est pas le système développé par cette entreprise française de Gap qui m’intéresse mais le nom de celle-ci, Beringer, me fait penser au champagne du même nom et je tiens à en connaître le lien… Dans un excellent anglais, la fille cadette de l’entreprise familiale, Claire Beringer, vend son produit avec conviction, employant sa mère Véronique comme « faire valoir ». A la fin de son intervention, j’obtiens la réponse à mon interrogation : les deux sociétés n’ont aucun lien si ce n’est que la jeune diplômée d’un MBA propose le champagne homonyme à ses clients acheteurs, la classe, quoi !
Après ce petit entracte je ressors pour regarder les présentations en vol qui ont débuté à 14h30. Paul McCowan et les Team Skydivers, Paul Tribute, les Young Eagles, Sean Tucker, Gene Soucy, David Martin, Bob Carlton et plein d’autres dont un Français, Nicolas Ivanoff, nous gratifient d’évolutions et de voltiges plus belles les unes que les autres. Je me régale et me revois l’année de mes seize ans, en Corse, quand cette vocation de pilote m’est venue !
Une patrouille de vingt T 6 croise une autre d’autant de T 28, tandis que deux Pitts font une voltige en tandem quelques mètres plus bas ! Impensable chez nous ! La vigie de la tour de contrôle arbore une banderole sur laquelle est inscrit : « World’s busiest control tower » (tour de contrôle la plus occupée au monde sous-entendue ayant à gérer le trafic le plus important au monde), ce qu’elle peut revendiquer, à coup sûr !
Jerry a eu la gentillesse de nous prêter deux sièges de toile, très confortables. Martine, qu’une mauvaise chute de ski quarante ans plus tôt a fragilisé son genou gauche, s’est installée devant le Media Center, à l’ombre d’un grand platane. Debout au début de l’après-midi pour ne pas être gêné par les branches de l’arbre pour suivre les évolutions des avions présentés, je finis, au bout de deux heures, par utiliser le deuxième siège. Mais j’ai du mal à resté assis, surtout quand Gene Soucy, à bord d’un Grumman G 164 A, David Martin, à bord d’un Cap 232, et Nicolas Ivanoff, Corse de 47 ans à bord d’un TBD, nous montrent l’étendue de leur talent. Les minima respectés par ces pilotes ne sont pas les mêmes chez nous, c’est le directeur des vols de différents meetings en Europe que je suis qui vous l’affirme ! Mais j’avoue que je me régale !
A 15h15, je fais un break en accompagnant Christophe au stand Honda pour voir cette curieuse machine qu’est le HondaJet HA-420, petit biréacteur (les moteurs sont fixés sur l’extrado des ailes) d’affaires de deux fois une tonne de poussée, prévu pour 1 pilote et 5 passagers (ou 2 et 4). Cette petite visite ne m’empêche pas de voir une patrouille de quatre Aero L 39 « Albatros » et une de quatre Lockheed T 33 « Silver Star » mieux connu comme « T-Bird », avion que j’ai bien connu au début de ma carrière, juste avant de recevoir mes deux ailes de pilotes de chasse, le 13 mai 1971.
Entre deux présentations, je profite des installations du Media Center qui a mis à notre disposition quatre ordinateurs PC avec imprimantes pour nos liaisons avec nos médias. J’en profite, « time to time », pour prendre des nouvelles de Joëlle par le Web interposé.
A 17h00, le ciel s’assombrit. Nous décidons de rejoindre nos chambres et prendre une bonne douche avant d’aller dîner. Car il fait chaud, moins qu’il y a une semaine à Las Vegas mais tout de même. Et puis, vous l’avez remarqué, les Américains mangent tôt le soir. En fait nous n’avons pas les mêmes façons de vivre… Nous atteignons la maison de Jerry à 17h35 alors que le ciel commence à nous tomber sur la tête. Il tombe des cordes. Jerry se hâte de décrocher le drapeau américain (présent sur beaucoup de demeures aux USA) qui est fixé sur le poteau gauche de la maison. Il le roule et le mets à l’abri du garage.
A 19h00, Jerry accepte de nous conduire au centre d’Oshkosh qu’il est toujours très difficile à trouver à cause des nombreuses déviations dues au « Fly-In » et aux travaux qui perturbent la Gourde qui Parle Seule (le GPS). Christophe et moi souhaitions retrouver un restaurant qui nous avait bien plu deux ans auparavant et Jerry nous en conseillait un autre, le meilleur du coin selon lui. Ayant garé la Cherokee sur la place centrale, nous marchons jusqu’à celui connu de notre hôte alors que la pluie se remet à tomber. A peine cent mètres, un rien. Mais le restaurant est plein et l’attente prohibitive. Christophe nous dit que le « nôtre » est un peu plus loin. Je propose de reprendre la voiture car le cunimb (6) n’est pas loin de nous déverser ce qu’il a emmagasiné tout l’après-midi à cause de la chaleur régnant aujourd’hui.
– « Non, c’est pas utile, c’est juste là-bas… » nous dit-il
– « Où ça, là-bas ? » demande Alain
– « Juste après le feu, là-bas » répond-il en montrant le feu tricolore du prochain carrefour
En fait de prochain feu, il faut aller jusqu’à celui d’après, deux cents mètres plus loin ! Martine « tire la patte » et je commence à m’impatienter. A 19h10 enfin, nous sommes attablés. Heureusement car il pleut averse. Christophe voit bien à ma tête et à celle de Martine que nous n’avons pas apprécié cette ballade pluvieuse…au cours de laquelle nous n’avons pas chanté… Quelques minutes plus tard, la pression est retombée d’autant que pour se faire pardonner, Christophe nous offre un excellent Shannon Ridge 2012 du Lake County.
A 21h15, nous sommes de retour chez Jerry. Nous nous installons dans le garage ouvert qui sert de salon. Nous regardons les informations sur Fox News…et prenons les impressions de Martine et Alain sur cette première journée à l’EAA. Les photos et le reportage que nous donnerons à nos journaux sont déjà presque prêts à être envoyés… Pas tout-à-fait tout de même ! Nous allons nous coucher avec consigne de se retrouver au petit-déjeuner à 7h15. Nous ne voulons pas être en retard au briefing de Dick…
A 8h35, nous sommes tous les quatre dans la salle du Media Center. Dick commence son intervention à 8h45 précises. Il n’y a pas de quart d’heure charentais. Tout le monde est à l’heure ! Dick nous présente la journée du mercredi 30. Comme la veille, son briefing dure un quart d’heure d’autant qu’aujourd’hui, une conférence sur invitation de Boeing nous est proposée à l’autre bout du site, au musée…à 9h30 ! Et le tram qui nous y conduit part à 9h15. Seize minutes plus tard Martine, Alain, Christophe et moi pénétrons dans une salle du musée aménagée en salle de restaurant comprenant une dizaine de tables rondes de dix places sur lesquelles sont posés des dossiers, des bouteilles thermos et quelques « bricoles » qui nous sont offerts, dont des stylos, des sacs à dos pliables et autres lampes-porte-clés. La salle est vide et je prends le temps de regarder les 18 panneaux qui retracent l’histoire de l’EAA.
Il est 10h10 (eh oui, tout le monde n’est pas correct) quand Sherry Carbary, Vice- présidente du service commercial de la division des vols de Boeing, débute sa conférence sur
la nouvelle formation des pilotes et des mécaniciens de la compagnie. A 10h25, David Wright, Directeur du nouveau programme de formation, la remplace au pupitre. Pilote lui-même, ses dix minutes de présentation me laisse perplexe et m’amène à lui demander ce qu’il pense de l’accident du Rio-Paris d’Air France, le 1er juin 2009. Il reconnait que la formation en est la cause principale mais semble embarrassé pour me dire que les leçons tirées de cet accident ont été prises en compte…dans leur nouveau cursus de formation…
A 11h00, étant sur place, nous en profitons pour visiter le musée. Je m‘attarde plus particulièrement sur les pièces rares dont ce magnifique Bugatti 100 Air Racer et le Ryan B1 « Spirit of Saint-Louis » réplique de l’avion avec lequel Charles A. Lindbergh relia Roosevelt Field sur Long Island au Bourget, entre le 20 et le 21 mai 1927, en 33 heures ! Et cette réplique est l’œuvre de bénévoles de l’EAA !
Mais autre chose me turlupine. La veille, lors de mon séjour à la « Fighter Town », j’ai acheté un livre sur les mémoires d’un pilote de chasse qui a fait la guerre, un certain Robin Olds, écrit en collaboration par Ed Rasimus et sa fille, Christina. Or j’avais appris que cette dernière dédicaçait son ouvrage, un quart d’heure avant que je ne l’achète. Renseignement pris ce mercredi matin, je savais qu’elle devait le faire à partir de 11h30, après une conférence qu’elle donnait au musée. Je la recherche donc et la trouve au magasin du musée. Mais je n’avais pas le bouquin avec moi puisqu’il était dans ma chambre, chez Jerry ! Qu’à cela ne tienne, je lui ai demandé de me signer une de ses cartes de visites que j’ai collée dans le livre à mon retour… Mais de ça, vous vous moquez, n’est-ce pas ?
Un yellow-bus pris devant le musée à l’ouest du site nous dépose au parking des bus où la ligne verte de tram pourrait nous conduire au Media Center. Nous préférons parcourir les 200 mètres à pieds en s’arrêtant dix minutes au stand de Safran pour découvrir leurs nouveaux moteurs diesel SR 305 et SR 460. Puis Alain et moi grenouillons dehors autour des TBM « Avenger », MV 22 « Osprey », Boeing B 17, Mitsubishi A6M « Zero », Fairey « Gannet », Douglas DC3, General Dynamics F 16 des Thunderbirds (un de leurs avions qui sert aux gamins à se faire photographier aux commandes), WB 57 F de la NASA, avion expérimental à cellule de Canberra et autre Chance Vought « Corsair », l’avion de Papy Boyington (Vous vous souvenez ?… « Les Têtes brûlées »), pendant que Christophe cherche à nous trouver « une cantine gratuite » et que Martine profite du soleil, assise dans l’herbe. Avec les invitations qui nous ont permis d’assister à la conférence de Boeing ce matin, Christophe pense que nous serons invités au déjeuner que la société offre à ses « clients »… Le problème est que nous ne rentrons pas dans cette catégorie malgré le culot de Christophe ! A 13h00, à défaut d’invitation par le Groupe de Chicago nous retournons déjeuner au fast food d’hier… pas terrible !
A la sortie du restaurant je peux assister à l’arrivée du numéro 8 des Thunderbirds, chargé de préparer la prestation de ses camarades les 2 et 3 août. Après un passage au Media Center pour envoyer quelques lignes au P’tit Cagouillard et un courriel à Joëlle, je rejoins Alain et Christophe qui veulent retourner voir les Warbirds, sans Martine qui préfère rester à regarder les présentations en vol, bien assise dans une chaise de Jerry, sous l’arbre du Media Center. Nous passons encore 50 minutes à regarder de près tous ces bijoux de l’aviation. Alain et Christophe retourne un bon quart d’heure au magasin de la zone pour compléter leur « garde-robes », pendant que je m’intéresse aux jets de l’après-guerre !
A 16h30, nous sommes de retour au Media Center. Martine est toujours en train de « buller » sous son platane. Je m’installe à côté d’elle dans la deuxième chaise pliante et regarde la fin des démonstrations. A peine assis, c’est notre Corse national, Nicolas Ivanoff, qui est en vol à bord d’un Zivko Edge 540, avion de voltige américain utilisé dans le championnat Red Bull de course aérienne. Suivent quelques Warbirds, Patty Wagstaff et son Extra 300, Michael Rambo et son T 6A Texan II, Justin Lewis, Mike Wiscus les Texas Flying Legends qui nous gratifient d’un combat entre Corsair et Zero… et j’en oublie.
A 17h30 nous reprenons notre Cherokee pour quitter définitivement l’EAA AirVenture… pour cette année au moins. Car je compte bien y revenir et je ne suis pas le seul.
A 18h15 nous sommes de retour chez Jerry pour faire nos valises car nous prenons la route vers Chicago O’Hare demain à 10h00 et nous ne voulons pas courir…A 19h00, nous prenons notre dernier dîner au Benvenuto’s d’Oshkosh, restaurant italien que nous avions fréquenté en 2012 avec quelques membres de l’Aéroclub de France que nous y avions rencontrés.
A 9h00, le jeudi 31 juillet, nous prenons notre troisième et dernier petit-déjeuner préparé par Jerry. Succulent, comparé à ce que nous avons ingurgité jusque là… Merci Jerry. Une séance photos avec notre hôte est programmée avant notre départ. Clic clac, Kodak. C’est dans la boîte à 10h00. Nous pouvons dire au revoir à Jerry et non pas adieu, car nous nous reverrons, c’est promis…
Le retour se fait par le même chemin qu’à l’aller. Même le restaurant où nous déjeunons est le même. Mais la surprise de la facture d’Advantage a failli nous faire rendre la totalité du déjeuner à cause de l’arête en travers de la gorge qu’elle nous a placée. L’addition est presque le double du prix « garanti » par Europcar ! Car Europcar a oublié, volontairement ou non, un tout petit détail : les taxes se montent à plus de 25%, et il y en a à chaque ligne de la facture !…
Cette dernière « olive » ne nous abat pas le moral. L’EAA AirVenture nous a mis le cœur dans les étoiles… pour longtemps !
L’A 330 d’Air France nous ramène à Roissy le vendredi 1er août avec deux heures de retard, loin du « Paradis des aviateurs »…
Au revoir Oshkosh et merci à Dick et au P’tit Cagouillard…
Notes:
(1) L’ensemble du site couvre une surface de 1500 acres (607 ha) que se répartissent, par moitié, l’aéroport régional de Wittman, au nord-est et l’EAA, au sud-ouest.
(2) Les « One arm bandits » sont les machines à sous des très nombreux casions des hôtels du « Strip » de la capitale mondiale du jeu.
(3) Selon ma compagne qui n’aime conduire que les voitures à boîtes de vitesses manuelles, les « voitures à pédales » sont celles à boîtes de vitesses automatiques, ce qui est le cas de 90% des voitures de location aux États-Unis d’Amérique.
(4) L’aéroport d’Oshkosh, Wittman Regional Airport, est situé est sud de la ville laquelle est bordée à l’est par le lac Winnebago au niveau du 44° parallèle nord.
(5) Ces « trams » qui comprennent deux wagons à six rangées de bancs à quatre places sont tirés par des tracteurs John Deere 3046 R de 46 CV. Il existe trois lignes (bleue, rouge et verte) reliant certains points du site, en plus de nombreux bus scolaires jaunes « International Blue Bird » et de golf-carts et Ford T à louer.
(6) Abréviation de cumulonimbus, nuage d’orages qui peuvent être très violents.
6 Comments
Anonyme
Superbe. On aimerait bien y voir un Rafale un jour…
Michel47
Quel fabuleux meeting… mais hélas trop loin.
C'est vrai M. Yves, le Rafale Solo Display y ferait sensation. Une idée à leur souffler pour le meeting 2015…
Adrien Schneider
J'ai eu l'immense honneur de rencontrer Paul Poberezny
Adrien Schneider
C'était lors de mon voyage à Oskosh il y a 5 ans. Merci Yvon pour ton récit qui en a ravivé bien de beaux souvenirs. Moi aussi je meurs d'envie d'y retourner et j'en connais un qui s'y sentirait au paradis… je veux parler de notre ami Claude Pichegru dont l'année a malheureusement très mal commencé avec le décès de sa sœur. Bises à tous les deux. Adrien
Mahesh
We would like to promote Urban Aero Systems as an Aviation Infrastructure company that aims to introduce cutting-edge aerospace support technologies into India. We have our own modern infrastructure, with a highly experienced team in Aviation.
Fec Heliports
Airport Authority of India Helipads
Fre
retourner à Oshkosh.