l’Ile de la réunion visée par une frappe nucléaire… Un Rafale n’est pas rentré à la base.

Sous ce titre un peu aguicheur (provocateur diront certains) se cache une réalité quotidienne de l’armée de l’air. Maintenir la capacité de pouvoir porter le feu nucléaire à très longue distance, sans préavis.
 C’est donc l’île de la Réunion qui aura fait les frais de cette frappe à 8800 km de la métropole.

crédit photos: armée de l’air et Alban Battestini

Après un vol d’un peu moins de 9000 km réalisé sans escale, les deux Rafale ont frappés des objectif virtuels sur cette île de l’océan indien. Les forces aériennes stratégique, la partie aéroportée de l’outil de dissuasion nucléaire de la France est bien plus polyvalent que l’on ne pourrait le croire. Heureusement, le missile à charge nucléaire ASMP-A n’a jamais été tiré en conditions réelles, mais des frappes stratégiques peuvent être menées à l’air du missile de croisière SCALP, ou même tactiques avec jusqu’à six bombes guidées laser ou missiles AASM. C’est ce qui s’est produit au tout début de l’intervention au MALI, ou dans une moindre mesure lors du conflit libyen.

Cette capacité de frappe à longue distance n’est pas une chose aisée à acquérir, et encore moins à maintenir. Il faut pouvoir détenir la capacité d’établir un plan d’attaque à l’aide de renseignements d’origine diverses, de pouvoir solliciter une logistique particulière avec le déploiement d’avions de ravitaillement en vol, de disposer de matériels capables de voler aussi longtemps, mais aussi d’équipages entraînés spécifiquement à cette tâche. Après plusieurs heures de vol, l’équipage ne doit pas perdre sa concentration, car, suivant le profil de la mission, s’ensuit une partie de rodéo dans les montagnes, et l’engagement d’armes en milieu hostile.

A ce niveau là, même les questions les plus élémentaire de gestion des déchets humains n’est pas à prendre à la légère. Les repas sont spécifiquement étudiés bien en amont du vol, et les équipages équipés pour pouvoir évacuer l’urine, mais également de couches.

J’ai un profond respect pour ces hommes et femmes, et j’ai toujours une pensée vers eux lorsque j’aperçois les messages distillés sur l’autouroute: “toutes les 2H, une pause s’impose”. Pas de pause… Et quand il faut refaire le plein, on ne s’arrête pas. Il faut s’accrocher à la pompe, à plusieurs centaines de km/H. Et pour terminer, foncer vers l’objectif en évitant d’être repéré, d’éviter si possible de se faire tirer dessus. Toute perte de concentration n’est pas permise, en toutes circonstances, y compris lorsque son hygiène corporelle est mise à mal par une couche “souillée”.

Arrivés sur l’aéroport de Saint Denis de la Réunion, au détachement air 181 « Lieutenant Roland Garros » le 22 avril dans l’après-midi, les deux avions ont ensuite participé à des exercices de support aérien avec le 2ème RPIMA basé sur l’ile.

Panne:

Peu de temps avant le départ, le système d’auto-diagnostic d’un des deux appareils a signalé un dysfonctionnement au niveau d’une de ses servocommandes. Techniquement, l’appareil pourrait prendre l’air. mais dans le cas d’un appareil à 62 millions d’euros pièce, la prudence est de mise. L’ordinateur de gestion du vol est en effet capable de s’adapter automatiquement à l’état de l’avion, et la perte d’une partie des gouvernes suite à une panne  ou à des dommages liés à l’ennemi, l’ordinateur de bord s’adapte automatiquement.

Une fois réparée, la procédure de maintenance appliquée en temps de paix impose la validation de la maintenance à l’aide d’un banc d’essai. Problème, celui-ci se situe au sein de l’Escadron de Soutien Technique Aéronautique (ESTA) 15/7 Haute-Marne sur la base aérienne de Saint Dizier. Le banc de test, devant fournir les 350 bars de pression hydraulique, nécessaire à l’alimentation des servocommandes n’est pas une petite pièces transportable dans une valise. Il nécessite donc un affrètement d’un nouveau C-135fr qui servira également au ravitaillement du Rafale lors de son vol retour. Et les seuls 14 appareils en parc ont un emploi du temps bien chargé. L’armée de l’air n’aura pas pu en libérer un avant la semaine prochaine.