Photo de présentation de Clean Sky http://www.cleansky.eu/ |
Suite de l’article sur le futur vert de l’aviation publié ici
L’été dernier, durant le salon du Bourget une annonce pourtant fondamentale pour l’avenir de l’aviation relativement est passée inaperçue entre la guerre commerciale Airbus/Boeing et les époustouflantes démonstrations du Sukhoi 35 : Le programme européen “Clean Sky 2”.
Il s’agit d’un partenariat public/privé en continuation du programme “Clean Sky 1” qui avait été doté de 1,6 milliard d’euros.
Clean Sky 2 est encore plus ambitieux, avec une dotation de l’UE de 1,8 milliard d’euros à laquelle s’ajoutent 2,25 milliards d’euros d’investissements privés.
Ces programmes s’inscrivent dans le cadre de l’initiative “vision 2020” et sont dirigés par l’ACARE (Adisory Council for Aeronautics Research in Europe). Il tendent à des objectifs très ambitieux, rien de moins que de diviser la consommation et la production de CO2 de 50%; de diminuer le bruit par un facteur 2 et la production de NOx 80% du transport aérien par rapport à 2001!
Le programme Clean Sky était articulé autour de six grands démonstrateurs de technologie. Clean Sky 2 lui est, nous le verrons plus loin, centré sur trois prototypes. On voit donc bien qu’il s’agit de projets appliqués. Les six axes de recherche de Clean Sky 1 étaient les suivants:
SWFA pour “Smart Fixed Winged Aircraft” destiné à améliorer l’aérodynamique des futurs avions (en particulier au niveau des ailes).
GRA, Green Regional Aircraft , nouveau design d’un avion régional plus léger, économique et moins polluant.
GRC (Green Rotor Craft), un programme destiné à améliorer les pales d’hélicoptères (diminution de la traînée et du bruit) mais aussi l’intégration de moteurs diesels…
SAGE, “Sustainable And Green Engines” – dont l’objectif était la construction de démonstrateurs de moteurs intégrant de nouvelles technologies afin de réduire la consommation et la pollution.
SGO, “Systems for Green Operations”, projet d’avions “tout électrique”, mais aussi optimisation des routes aériennes au sein de l’espace européen…
ECO, comme Eco-design destiné à améliorer l’impact environnemental de la fabrication et du recyclage des pièces aéronautiques.
Programme SWFA :
Les objectif du programme SWFA sont ambitieux : réduire la traînée générale de l’avion de 10% en réduisant celle des ailes de 25% par l’utilisation de profils laminaires (diminution des turbulences). Réduire le poids (et donc la traînée induite par celui ci, un avion plus lourd ayant bien sûr besoin de plus de portance qu’un avion plus léger), réduire la consommation de 25% à l’aide de nouveaux moteurs, en particulier des “open rotor” (turbofan à double soufflante non carénée, des sortes de réacteurs modernes sans carénage), réduire le bruit des avions de 10 db à l’aide de configurations ou les moteurs seraient masqués (en particulier pour les jets d’affaires). Certaines de ces améliorations seront testées a partir de 2015 sur un A340 expérimental.
Illustration des deux profils d’ailes “intelligentes” testées sur le démonstrateur A 340 “BLADE”.
La diminution de la traînée sera obtenue à la fois par des moyens passifs et actifs (changement de la conformation de l’aile en fonction du régime de vol).
Photo Clean Sky
Sur cette photo, on observe clairement un empennage arrière destiné à masquer le bruit des réacteurs sur un jet d’affaires.
Photo Clean Sky
En synergie avec les programmes SAGE, SGO et ECO, que nous vous présenterons plus loin, ce programme devrait aboutir à la naissance du successeur de l’ Airbus A320, connu sous le nom de A 30X.
Photomontage des images d’artistes proposées par Airbus de l’A30X réalisé par Flightglobal.
Noter les 3 types de moteurs envisagés, turbofan optimisé, intégré dans la carlingue ou open rotor, le double empennage et la finesse du fuselage.
Deux brevets Airbus récents décrivent le montage des open rotor et des réacteurs intégrés au fuselage.
Programme SAGE :
L’objectif est de construire des moteurs plus sobres, moins polluants et moins bruyants pour l’ensemble des segments du marché des aéronefs.(hélicoptères, régionaux, monocouloirs et long courriers). L’initiative technologique inclut cinq démonstrateurs en fonction du type d’aéronefs et des architecture de moteurs testées (open rotor, turbofans à deux ou trois étages, turbofan à réducteur).
Illustration des 6 types de moteurs novateurs considérés dans le cadre du programme Clean Sky.
Photo Clean Sky
A la fin du programme d’étude des démonstrateurs technologiques, trois prototypes, l’un pour les monocouloirs, l’autre pour les long courriers ainsi qu’un moteur Diesel pour les hélicoptères seront proposés.
A l’heure actuelle, si la solution permettant le plus haut taux de dilution (et donc le moteur le plus propre et le plus économique semble être le turbofan (surtout pour les phases de montée et descente, donc particulièrement les courts courriers, voir précédent article), la solution technologique définitive choisie n’est pas encore figée (Air&Cosmos 1401, 11/04/2014).
Le premier démonstrateur, un turbomoteur SAFRAN, a tourné au banc en 2013 (La jaune et La rouge, Fev. 2014).
Programme SGO :
Actuellement (et avec les soucis bien connus que cela lui a causé), sur le plan de l’utilisation électrique, l’avion le plus moderne au monde est sans conteste le Boeing 787 “Dreamliner”. Alors que son concurrent direct l’ Airbus A350 consomme 0.8 MW, le 787 va utiliser une puissance de 1.5 MW.
Il existe de multiples raisons pour augmenter la part de l’énergie électrique dans les systèmes d’un avion par rapport aux systèmes “classiques” hydrauliques ou pneumatiques. Les câbles sont bien plus légers et faciles à maintenir que des tuyaux d’une part. D’autre part, l’énergie pneumatique directement dérivée des réacteurs est constante (même si inutilisée) alors que la génération d’énergie électrique est plus souple. Le rendement de l’ utilisation de l’ énergie électrique est bien supérieur, elle ne se “perd” pas (ou peu) dans la tuyauterie (pertes de charge).
Actuellement, même le Boeing 787 utilise toujours des systèmes pneumatiques (dégivrage par exemple). L’ objectif du programme SGO est d’arriver à un avion “tout électrique”
Diapositive de présentation du SGO extraite de la présentation Clean Sky Info Day. Noter que l’ensemble des systèmes de bord sont alimentés par la distribution électrique.
A la suite de ces divers programmes, Le projet Cleansky2 a été lancé.L’objectif est de structurer l’ensemble de ces études autour de trois prototypes selon la structure suivante :
Comme on peut le deviner, les trois prototypes concerneront les futurs Airbus SFWA, ATR (GRA) et Futur hélicoptère rapide.
Le future avion régional vert (ATR) sera un avion de la classe des 50 places. Ses principales innovations devraient se situer au niveau du dessin de l’aile de l’ empennage, des contrôles de vols et des moteurs.
On ne sait pas encore si les moteurs seront situés en nacelle sous les ailes ou à l’arrière de l’avion.
Une des vues d’artistes proposées pour le futur GRA
photo http://www.fundacionhelice.com/
Finalement, le troisième prototype devrait concerner les voilures tournantes, de la classe 3-6 tonnes. 2 proets sont en concurrence, l’un dérivé du prototype X3 d’ Airbus hélicoptères, l’autre d’un projet Agusta de voilure basculante.
L’eurocopter X3, démonstrateur technologique détenteur du record mondial de vitesse pour un hélicoptère (472 Km/h en palier)
Il existe bien sur en Europe des initiatives nationales coordonnées avec le programme cleansky (en France le programme CORAC), et des initiatives Nord Américaine ou encore japonaises du même type.
Mais il n’y a pas que Clean Sky!
Deux projets, dont l’un va être industrialisé ont aussi retenu l’attention. D’une part, le E-Fan, d’autre part le E-Airbus.
L’ E-Fan est un petit avion école tout composite à propulsion électrique. Bimoteur, il a été concu à l’origine par une PME, Aéro-Composites avant d’être développé en collaboration avec Airbus. Le fabriquant explique que ses coûts d’exploitation devraient être inférieurs à ceux d’autres avions école, avec en plus l’avantage d’un vol beaucoup moins bruyant (ce qui diminue les contraintes de voisinage des aérodromes).
L’E-Fan lors de son premier vol à Mérignac le 11 Février dernier. et il devrait être commercialisé d’ici 4 à 5 ans
Photo Airbus
Enfin et pour conclure cet article, l‘ E-Airbus
Jusqu’à récemment, l’E-Airbus était plus connu sous le nom de E-Thrust. Ce fantastique projet d’avion de transport à propulsion hybride est axé autour du système DEAP (Distributed Electrical Aerospace Propulsion).
En phase de montée et de croisière, une turbine à gaz génère de l’électricité qui est stockée par des batteries Lithium/air. La totalité du câblage est immergée dans un fluide cryogénique afait de permettre la supra conductivité (et donc pas ou presque de perte d’énergie électrique en chaleur dans le circuit par effet Joule).
Durant ces mêmes phases, les batteries alimentent six propulseurs. La descente se fait partiellement en planage, alors que la dernière partie est effectuée en mode “moulin à vent”, ce qui permet à la fois de ralentir l’avion et de recharger les batteries.
Ce processus est très bien expliqué dans une vidéo publiée par Airbus :