Jeudi dernier, le 7 septembre à minuit, marquait la date limite pour le dépôt de candidature dans le cadre de l’appel d’offre belge pour l’achat de nouveaux avions de combat destinés à remplacer la cinquantaine de F-16 encore en service dans la Composante Aérienne des forces armées belges. Fait notable, la Composante Air n’a pas émis un appel d’offre destiné aux industriels, mais bien un RFGP, Request for Government Proposal, imposant un soutien étatique, diplomatique et politique aux propositions techniques des industriels. Le gouvernement britannique, qui présente le Typhoon du consortium Eurofighter, et le JPO américain, pour le compte du Lockheed-Martin F-35, ont remis une offre officielle et disposent donc de cinq mois pour affiner leur proposition et dialoguer avec les services officiels avant la remise de la proposition finale en février prochain. Avant même la date butoir, cependant, Boeing avait retiré son offre qui portait sur le Super Hornet, estimant que la compétition était biaisée en faveur du F-35, qui avait à la fois les faveurs des aviateurs belges et le soutien de Washington. Le Suédois SAAB, qui espérait placer son avion de chasse léger Gripen, a également jeté l’éponge et refusé de transmettre un dossier de candidature.
La surprise de cette compétition belge pourrait alors bien venir d’outre-Quiévrain. Alors que, ces derniers jours, la presse spécialisée annonçait un possible abandon de la part de Dassault Aviation, la ministre des Armées Florence Parly a finalement annoncé jeudi que la France allait faire une proposition de gouvernement à gouvernement articulée autour d’une version améliorée du Rafale de Dassault Aviation, une lettre étant envoyée en ce sens au ministre de la défense belge.
A l’heure où nous écrivons ces lignes, le cabinet du ministère est en train d’examiner le statut juridique de la proposition française. En cas de validation, le Rafale serait alors le troisième candidat à la compétition belge, même si sa candidature se ferait en marge de la compétition officielle, du moins telle qu’elle est actuellement définie.
Pour le profane, ce dernier rebondissement vient complexifier encore une fois le long feuilleton du renouvellement des F-16. Afin de comprendre les enjeux politiques, militaires, économiques et diplomatiques de ce nouvel appel d’offre, il nous a semblé important de revenir sur certains faits historiques éclairant à plus d’un titre.
Un précédent : le contrat du siècle
Renommée Composante Air en 2002, la Force Aérienne belge était dotée d’une flotte conséquente et très professionnelle durant la Guerre froide, principalement équipée de chasseurs américains dès la fin de la Seconde Guerre mondiale. A partir de la fin des années 1960, deux contrats se succédèrent pour renouveler l’ensemble de la flotte belge. D’une part, en 1968, un contrat fut signé avec l’avionneur français Dassault pour la livraison d’une centaine de Mirage 5 assemblés en Belgique, des chasseurs supersoniques dépourvus de radars mais optimisés pour l’attaque au sol et la reconnaissance, selon la version. L’appareil étant apprécié des pilotes belges, Dassault espérait encore, quelques années plus tard, compléter la flotte belge avec de purs chasseurs-intercepteurs, les Mirage F1, qui avaient été testés par les pilotes belges et dont le contrat était sur le point d’être signé en 1973. Mais, suite à un changement à la tête du gouvernement, la Belgique décida d’intégrer un appel d’offre mené dans le cadre de l’OTAN, les états-majors belges, néerlandais, norvégiens et danois émettant une fiche commune pour le remplacement des F-104 vieillissants.
Théoriquement, la compétition était ouverte, et quatre candidats se présentèrent. Le suédois SAAB proposa l’excellent Saab-37 Viggen, mais l’opposition du gouvernement suédois à l’emport des bombes nucléaires de l’OTAN sur cet appareil causa, entre autres facteurs, son élimination. Dassault, de son côté, proposait le Mirage F1E-M53, une version considérablement améliorée du Mirage F1 qui intégrait le moteur et d’autres équipements du Mirage 2000 qui n’avait pas encore effectué son premier vol. En 1973, la version de base du Mirage F1 vient à peine d’entrer en service opérationnel dans l’Armée de l’Air, donnant l’illusion de modernité au chasseur français. En réalité, la conception de l’appareil remonte au début des années 1960, soit une éternité en plein cœur de la Guerre froide, où les programmes aéronautiques se succèdent à un rythme effréné. Le Mirage est néanmoins un candidat sérieux, technologiquement abouti, et dont les qualités en tant qu’intercepteur sont inégalées dans la compétition. Face à lui, en effet, se trouvent deux candidats américains qui s’opposent commercialement des deux côtés de l’Atlantique simultanément. General Dynamics propose son YF-16, tandis que Northrop tente de convaincre avec le seul bimoteur de la compétition, le YF-17.
Les pressions politiques et économiques furent importantes de la part des États-Unis, le futur de l’USAF et celui des forces européennes de l’OTAN se révélant intimement interconnectés. En effet, même si le YF-16 et le YF-17 s’affrontent au États-Unis pour l’équipement de l’USAF, cette dernière n’est pas pleinement convaincue du bien-fondé d’un tel programme. Mais en cas de victoire commerciale en Europe, dont le marché potentiel représente plus de 800 appareils à l’époque, l’opération deviendrait tout de suite plus intéressante pour l’USAF, qui pourrait déployer ses chasseurs en Europe avec une vraie continuité logistique, à moindre frais. Inversement, l’appareil qui serait sélectionné par l’USAF deviendrait automatiquement l’un des favoris de la compétition européenne, pour les mêmes raisons de continuité logistique, de réduction des coûts par effet de série, mais aussi de politique. L’USAF représente le véritable parapluie de l’Europe occidentale, la principale ligne de défense en cas d’attaque soviétique. Disposer du même matériel que l’Oncle Sam revient à s’assurer d’une collaboration à long terme sur le plan de l’entrainement et des déploiements opérationnels, des modernisations régulières et continues des systèmes d’arme, et d’une place aux tables de discussion stratégiques. L’intégration des bombes nucléaires américaines sur le futur avion s’avère, dans ce contexte précis, d’une importance politique majeure en Belgique.
En 1975, le F-16 est désigné vainqueur de la compétition américaine, condamnant les chances de succès du F-17 en Europe. Quelques mois plus tard, le F-16 Block 10 est déclaré vainqueur face au Mirage F1E pourtant bien plus mature et polyvalent, mais dont le potentiel d’évolution et le soutien politique sont perçus comme inférieurs. Pour les nouveaux clients du chasseur léger américain, le F-16 allait devenir le futur cheval de bataille de l’ensemble de l’Alliance, la machine à tout faire qui serait de tous les fronts.
Dans les faits, le F-16 allait effectivement devenir le nouveau standard des chasseurs légers occidentaux, même si sa sélection entraîna une pluie de commentaires de la part de Dassault et de l’industrie française en général qui ne manqua pas de critiquer les pressions politiques et économiques de Washington, nonobstant le fait que le F-16 était bel et bien un avion plus moderne et avec un bien plus grand potentiel d’évolution que le Mirage F1. En effet, même sans les pressions venues d’outre-Atlantique, le F-16 aurait sans aucun doute pu remporter cet appel d’offre, l’avion étant jeune et bien né, face à l’ultime évolution d’un Mirage F1 qui, de toute manière, n’était voué qu’à un rôle de transition dans l’Armée de l’Air avant l’arrivé de l’ACF. L’échec du Mirage F1 devant un F-16 bien plus moderne fut un électrochoc pour Dassault qui lança le développement sur fonds propres de ce qui allait devenir le Mirage 2000 d’abord destiné à l’exportation, mais qui allait rapidement remplacer l’ACF abandonné après le choc pétrolier, mais ceci est une autre histoire.
A l’époque donc, et en l’absence d’un appareil européen disponible et adapté (le Tornado est bien trop gros, et loin d’être opérationnel), la compétition s’orientait déjà vers une opposition entre une offre française basée sur du matériel éprouvé, polyvalent et fiable d’une part, et une offre américaine basée avant tout sur des avancées technologiques qui devaient encore faire leurs preuves et sur la promesse de faire partie d’un programme gigantesque qui viendrait remodeler le marché des chasseurs légers occidentaux. Et force est de reconnaître, avec 40 années de recul, que le pari de General Dynamics, depuis racheté par Lockheed-Martin, a été gagné haut la main.
De quoi justifier une redite du même scénario, quatre décennies plus tard ?
Bis repetita placent ?
Le retour sur cet événement passé permet d’éclairer les enjeux actuels, et notamment certains commentaires que l’on retrouve régulièrement dans la presse. LaLibre.be, le 6 septembre dernier, citait ainsi Eric Trappier qui aurait rappelé en juin dernier qu’il « redoutait de manière générale une volonté d’acheter américain »[1]. Pour Boeing, l’appel d’offre belge, pourtant adressé aux gouvernements, était déjà bien trop orienté en faveur du F-35, puisqu’un certain nombre de paramètres où le F-35 est techniquement en retard, comme la capacité de lutte anti-navire, n’est pas du tout concernée par l’évaluation, tandis que des critères de connectivité pour l’instant exclusifs au F-35 seront bel et bien évalués. De même, la capacité de frappe contre les systèmes d’anti-accès devra se faire sans prise en compte du relief du terrain, ce qui favorise de facto un avion furtif comme le F-35 au détriment du F/A-18E Super Hornet ou du Rafale. Pire encore, pour l’avion de Dassault Aviation, les conditions de financement évoquées dans l’appel d’offre belge seraient très favorable à une commande en FMS (Foreign Military Sales), le programme d’aide au financement des achats d’armements du département d’État américain. De même, la volonté inscrite dans l’appel d’offre de s’équiper de la même version de l’avion que celle utilisée par le pays vendeur n’est guère favorable au Rafale, puisque la France est bien souvent équipée d’appareils moins bien dotés que ceux disponibles à l’exportation, ou en tous cas équipés de matériels propres aux missions françaises (pénétration, frappe lointaine, missiles anti-navires lourds etc.) qui ne sont pas forcément utiles à d’autres nations. Ainsi, si les Rafale français sont équipés de la nacelle Damocles, bien adapté à la désignation à très longue distance par tous temps, ce seront les appareils livrés au Qatar qui intégreront la nacelle Sniper, plus adaptée aux missions de soutien aérien rapproché et en service sous les F-16 belges. Le F-35, de son côté, emporte en interne un équipement dérivé de la nacelle Sniper, de base. Pour plus de détails sur l’appel d’offre belge, nous vous renvoyons sur l’analyse faite par Yves Pagot dans un précédent article.
L’orientation de la Composante Air en faveur du F-35 apparait alors relativement évidente, faisant écho à un tropisme bien réel en faveur du matériel américain dans un grand nombre de pays de l’OTAN. Malgré tout, cet attrait ne s’explique pas que pour de basses raisons de magouilles politiques et financières, comme certains médias peu au fait des réalités du marché tendraient à le laisser penser.
D’une part, il convient de rappeler que le matériel américain, malgré tous ses défauts potentiels, reste d’excellente facture, d’un point de vue technique. Malgré tous ses défauts actuels, le F-35 mise sur cette bonne réputation, et la communication de Lockheed-Martin ne cesse de répéter à qui veut le croire que tous les problèmes seront résolus en temps et en heure. L’innovation technologique a toujours été primordiale dans les grands programmes aéronautiques du Pentagone, même si certains commentateurs et opérationnels peuvent être amenés à critiquer, à juste titre, certaines de ces avancées techniques qui ne correspondent pas forcément aux besoins de tous les clients potentiels. La furtivité du F-35, alliée à une hyper-connectivité du vecteur et de ses composants, est un maillon essentiel des stratégies de projection de puissance développées par l’USAF, intégrée parmi d’autres vecteurs capables de l’exploiter de manière optimale. Ainsi équipé, un F-35 offrirait théoriquement une connaissance de l’environnement et des possibilités tactiques jusqu’à présent inédites, de quoi faire fantasmer nombre de pilotes de la Composante Air qui voient dans le F-35 le futur du combat aérien, et donc le must have pour leur carrière. Mais cette technologie très coûteuse peut difficilement montrer sa pleine valeur en dehors de ce réseau de multiplicateurs de force dont l’USAF est bien souvent le seul contributeur au sein de l’OTAN.
Employé hors de ce réseau de systèmes intégrés, le F-35 perd immédiatement de sa valeur tactique, à tels points que de sérieux doutes ont émergé au fil des années, de part et d’autre de l’Atlantique, sur la viabilité de sa supériorité technologique. Le développement de l’appareil s’étale en effet avec le temps, les problèmes résolus mettant en lumière d’autres défauts de l’appareil, tandis que les coûts du programme semblent refuser toute forme de stabilité. Tour à tour, le viseur de casque, la capacité de super-croisière, le système de visée optronique, la fiabilité du moteur, la maniabilité au combat, le logiciel du système de combat ou encore l’intégration des armements sous voilure ont fait l’objet de critiques détaillées. Pour certains analystes, voire certaines armées de l’air, le F-35 ne représenterait pas une véritable rupture opérationnelle vis-à-vis d’avions plus anciens, plus matures et dynamiquement plus performants comme le Rafale ou l’Eurofighter Typhoon, tous deux proposés à la Belgique. Ainsi, l’Inde présente le Rafale comme un vecteur de 5e génération, nonobstant les critères de la communication de Lockeed-Martin et du Pentagone, taillés sur mesure pour n’y faire entrer que les seuls F-22 et, au forceps, F-35.
De leur côté, les défenseurs du F-35 rappellent à juste titre que son utilité au combat, comparativement à d’autres vecteurs plus anciens, serait quasiment décuplée dès lors qu’il serait utilisé dans un cadre otanien, et plus particulièrement aux côtés des appareils l’USAF, dans une opération militaire coordonnée par les Américains.
Ainsi, s’équiper de matériel américain, et plus particulièrement d’un système aussi stratégique que le F-35, revient à faire un choix, celui de la dépendance aux armées américaines. Pour un observateur français connaisseur des questions stratégiques, cette notion sonne quasiment comme une insulte, une erreur majeure à ne surtout pas commettre[2]. Néanmoins, pour un petit pays doté d’une armée professionnelle mais de dimension réduite, la contrepartie de la dépendance opérationnelle à Washington est celui de la visibilité diplomatique sur la scène internationale, tout particulièrement dans le cadre des coalitions sous l’égide de l’OTAN. C’est le ticket d’entrer pour participer aux opérations internationales majeures, pour jouer un rôle actif dans la défense des intérêts nationaux et internationaux, pour participer aux résolutions diplomatiques des crises internationales, mais rester visible parmi les nations qui comptent, aussi petites soient-elles.
Dans un contexte de réduction budgétaire et de réductions des flottes de combat, l’importance politique et diplomatique d’un allié mineur se mesure à sa capacité à fournir des unités combattantes au sein d’une coalition. Or, la meilleure manière de fournir une partie visible de l’effort militaire dans une coalition est sans doute d’être équipé du même matériel que le contributeur principal, en l’occurrence les USA. Les déboires des Mirage français pendant la Guerre du Golfe, ou plus récemment ceux des Gripen en Libye en sont des exemples flagrants. Les débats autour de l’utilisation des Mirage 2000D sur le théâtre du Levant, qu’ils soient justifiés ou pas, montrent que la problématique est toujours réelle et très présente aux seins des armées de l’OTAN qui ne souhaiteraient pas être mises à l’écart des opérations les plus importantes parce que leur matériel s’avérerait incompatible avec les procédures mises en place ou les multiplicateurs de force déployés. Or, les États-Unis mettent en place les procédures en fonctions des capacités techniques de leur matériel, qu’il s’agisse de multiplicateurs ou d’avions de combat, comme le F-35 justement. Même si, en théorie, les équipements français et européen en général sont compatibles avec les normes de l’OTAN, on a déjà vu en Afghanistan des exemples empiriques où les troupes au sol, souvent américaines, exigeaient l’intervention d’un type d’équipement particulier, comme la bombe JDAM de fabrication américaine, privant les Mirage 2000 de la possibilité de participer au combat, quand bien même les GBU-12 qu’ils embarquaient étaient parfaitement aux normes OTAN.
Comme on le voit, le débat autour de la dépendance au principal contributeur de l’OTAN, les États-Unis, ne regarde que les dirigeants et le peuple belge, et il ne nous appartient pas de juger s’il s’agit de la stratégie la plus à même de défendre les intérêts à long terme de la Belgique. Tout au plus rappelons encore une fois qu’une politique de vassalité, dans le cadre d’une alliance, ne signifie pas forcément une politique de faiblesse opérationnelle, mais peut découler d’un choix tout à fait pragmatique.
L’heure du choix pour la Belgique
Dans les prochains mois, les pouvoirs publics et les forces armées belges vont devoir faire un choix en faveur du F-35 américain, de l’Eurofighter Typhoon européen, ou du Rafale français, si la proposition de Paris n’est pas rejetée sur la forme, évidemment. Au-delà des caractéristiques techniques et des éventuelles pressions politiques, plusieurs facteurs propres à l’appel d’offre belge doivent être pris en compte pour bien cerner les enjeux opérationnels de ce marché.
En premier lieu, on notera que la demande belge porte à la fois sur un montant et sur un nombre d’appareils, à l’instar de l’appel d’offre suisse de 2011. Trente-quatre appareils devraient être achetés avec une enveloppe de 3,5 milliards d’euros environ pour les seuls coûts d’acquisition, une enveloppe supplémentaire étant prévue pour la formation et l’entretien, dans des proportions qui rappellent les contrats passés par l’USAF pour les livraisons de F-35. Si cette manière de procéder permet, sur le papier, d’anticiper l’organisation structurelle des forces tout en débloquant les fonds nécessaires dans le budget de l’État, elle a également montré à de nombreuses reprises ses limites dans le cadre d’achat d’armements modernes. À l’heure de l’interconnectivité des systèmes et de la polyvalence des plates-formes, un budget donné permet d’acheter une capacité opérationnelle bien précise plutôt qu’un nombre de vecteurs. Avec trente-six Rafale capables de rotations rapides et dotés d’une grande capacité d’emport, la force aérienne indienne espère ainsi réaliser autant de missions qu’avec deux ou trois fois plus de Su-30.
En contraignant à la fois le budget et le nombre d’appareils, sans expliciter quel facteur aura la priorité entre le coût et le nombre d’appareils, la Composante Air se réserve une porte de sortie en cas de contestation du vainqueur. D’autant plus que le nombre de 34 appareils marque l’extrême limite basse pour le maintien des capacités opérationnelles de la force, qui compte actuellement 59 F-16 dont 5 en réserve, et qui était encore équipée de 220 chasseurs à l’aube des années 1990. Pire encore, en cas de victoire du F-35, et si celui-ci ne voit pas son prix se stabiliser et rapidement baisser, le budget de 3,5 milliards d’euros pourrait rapidement exploser ou, si le coût s’avère être le facteur limitant, limiter les acquisitions à seulement 28 ou 30 appareils.
Avec la cinquantaine de F-16 actuels, la Belgique se retrouve déjà en difficulté pour maintenir son contrat opérationnel, qui est celui de la défense de l’espace aérien et du déploiement en opérations extérieures de dix chasseurs. Avec seulement 34 appareils, les OPEX devront se contenter d’une demi-douzaine d’appareils, un chiffre qui pourrait se réduire à moins de quatre en cas de flotte réduite à 28 ou 30 appareils.
Et c’est autour de cette problématique que vont s’articuler deux types de solutions proposées à la Belgique.
F-35 : le changement dans la continuité
Le choix le plus probable, à tel point que le vainqueur semble avoir été déjà admis par certains commentateurs, s’inscrirait dans la continuité de la compétition officielle, qui n’inclut pour l’instant que le Typhoon et le F-35. Avec un appel d’offre taillé sur mesure pour le F-35, difficile en effet d’envisager un autre vainqueur.
La communication et le lobbying de Lockheed-Martin, particulièrement actifs depuis la sélection du F-35 pour la force aérienne néerlandaise, semblent en effet avoir porté leurs fruits au sein des élites militaires belges. Le F-35 est vu en effet par de nombreux aviateurs comme le ticket d’entrée au sein du club des nations dotées d’avions de cinquième génération, mais aussi comme la continuation d’un mode de pensée stratégique et doctrinale profondément ancré chez les militaires belges depuis plusieurs décennies. Acheter américain, c’est poursuivre dans la continuité des efforts entrepris depuis 40 ans, dans la continuité de la politique étrangère menée depuis la fin de la Guerre froide, ce qui a un impact loin d’être négligeable sur des biais cognitifs connus pour jouer un rôle parfois décisif dans l’attribution de marchés publics à forte valeur politique, comme le biais de statu quo ou encore celui des coûts irrécupérables. Au-delà de ce que le F-35 peut apporter de nouveau en tant que plate-forme de 5e génération, il convient surtout alors de voir ce qu’il permet de ne pas perdre, de ne pas changer.
D’une part, le F-35 est le seul appareil de la compétition qui devrait être qualifié pour l’emport de la bombe nucléaire américaine B61, stockée sur un certain nombre de bases européennes pour pouvoir être mise en service par les forces locales de l’OTAN, une capacité que Bruxelles compte bien conserver, comme l’a rappelé récemment le ministre belge des affaires étrangères, même si elle n’apparaît pas dans l’appel d’offre, en tous cas publiquement. Au-delà du statut que cela confère à la Belgique au sein des forces aériennes de l’OTAN, la présence de bombes nucléaires sur les bases belges leur offre un statut privilégié, optimisant les chances de déploiement de troupes américaines sur le territoire belge en cas de conflit majeur. L’Eurofighter Typhoon n’est actuellement pas qualifié pour des missions nucléaires, et une telle qualification demanderait du temps et des moyens, si jamais elle s’avère techniquement faisable. Le Rafale, quant à lui, est parfaitement apte à la mission nucléaire qu’il remplit au profit de l’Armée de l’Air, de la Marine Nationale, et prochainement de l’Indian Air Force. Reste que les Rafale français sont équipés d’un missile nucléaire autrement plus avancé que la bombe B61, dont l’intégration sous le Rafale n’est pas assurée en cas de blocage des autorités américaines. Face à la remise en cause croissante de cette mission nucléaire, tant dans la classe politique belge que dans population, le soutien politique inconditionnel à cette capacité est souvent interprété comme une manière détournée de forcer la main à la Composante Air en faveur du F-35. D’autant plus que de sérieux doutes persistent sur la capacité nucléaire du F-35. Celle-ci ne serait pas intégrée avant le milieu des années 2020 au mieux, si jamais elle l’est un jour, et elle pourrait bien ne concerner qu’une version évoluée de la B61, qui n’est pas encore en stock en Belgique. Enfin, d’un point de vue technique, son intégration sous le Rafale ne poserait pas de problème, la bombe ayant déjà été intégrée sous Tornado et envisagée sous Mirage 5, avant que l’idée ne soit abandonnée pour raisons budgétaires. Dans ce contexte, un refus de la part des autorités américaines pourrait entraîner de réelles frictions entre Bruxelles et Washington, bien plus qu’avec Paris, si bien que la question de l’intégration de la bombe H est en réalité un faux problème pour le Rafale, même si la question reste pertinente pour le Typhoon.
Le véritable argument opérationnel en faveur du F-35 est celui évoqué dans les paragraphes précédents : les synergies opérationnelles et logistiques. Équipée du même appareil que son puissant allié américain et un nombre important de nations de l’OTAN (Italie, Norvège, Danemark, Pays-Bas, Royaume-Uni et Turquie, avec le Canada et l’Espagne comme clients potentiels à plus long terme), la Composante Aérienne pourra très facilement s’intégrer à l’ensemble des coalitions internationales qui comprendront des forces américaines, sans jamais subir la moindre limitation dans les règles d’engagement ou le choix des armements, puisque ces derniers auront été définis par les Américains eux-mêmes. Bien entendu, un déploiement sans l’aide américaine s’avérerait bien plus complexe avec des F-35 qu’avec des Rafale, voire des Typhoon, comme les interventions égyptiennes et émiratis en Libye l’ont bien démontré ces dernières années. Néanmoins, avec moins d’une quarantaine de chasseurs, la Belgique aurait de facto renoncé à toute capacité significative d’intervention extérieure autonome, quel que soit le type de chasseur sélectionné. Ce fait acté, le choix américain s’avère le plus rationnel pour accomplir les objectifs opérationnels de la Composante Air, à savoir la défense aérienne du territoire belge en coopération avec les forces amies, et le déploiement d’un contingent de chasseurs au sein d’une coalition.
D’autant plus que le F-35 a d’ores et déjà été sélectionné par la force aérienne néerlandaise. Et il s’agit là de l’argument massue en faveur du F-35 en Belgique. En effet, la défense aérienne des deux pays, ainsi que le Luxembourg, est pleinement intégrée depuis le premier janvier 2017. A tour de rôle, les armées de l’air belge et néerlandaise assurent la protection aérienne de l’ensemble du territoire national des deux pays, plus le Luxembourg. Ce système de rotation avait déjà été mis en place dans les déploiements extérieurs, les deux pays alternant le déploiement de leurs F-16 opérant contre Daesh depuis la Jordanie. A long terme, si les deux armées continuent d’être équipées des mêmes avions et des mêmes armements, elles pourraient fusionner, dans les faits, en une seule force opérationnelle cohérente, dotée d’une logistique et de commandements communs pour les déploiements extérieurs comme pour la défense aérienne. Si le choix du Typhoon ou du Rafale aurait finalement peu de conséquence sur la protection métropolitaine, puisque les protocoles de communication et d’interception restent communs, il représenterait un véritable frein logistique aux déploiements communs sur les théâtres extérieurs. Bien évidemment, aussi bien la France que les membres du consortium Eurofighter seraient prêts à engager des partenariats de défense aérienne conjointe avec la Belgique. Ceci étant dit, même si un accord avec la France ou l’Allemagne, par exemple, pourrait s’avérer objectivement plus avantageux, il est souvent plus facile et gratifiant pour une structure militaire de s’inscrire dans un partenariat avec une nation dotée d’une armée de taille et de puissance similaire, afin de créer véritablement une nouvelle structure conjointe, plutôt que de se contraindre à rentrer dans le moule des procédures du partenaire.
On le voit, le choix du F-35 s’imposerait dans la continuité des alliances et des modes opératoires de la Composante Aérienne belge. Il permettrait de maintenir la place de la Belgique dans le réseau des alliances américaine, Bruxelles s’avérant un allié modeste sur le plan militaire, mais fiable sur le plan politique, diplomatique et industriel. Dans le même temps, il permettrait de continuer à faire évoluer positivement le partenariat avec les Pays-Bas, avec à la clé une intégration pleine et entière des deux forces aériennes modestes au sein d’une unique structure opérationnelle bien plus crédible militairement.
Rafale : le quitte ou double politique
Depuis quelques mois, la communication de Dassault Aviation semblait quelque peu ambiguë par rapport à l’appel d’offre belge. La société française n’a en effet pas caché qu’elle avait plus ou moins fait le même constat que Boeing et SAAB avant elle : l’appel d’offre est taillé sur mesure pour le F-35. Par exemple, la restriction à 34 appareils pourrait empêcher Dassault, SAAB ou Boeing de faire une contre-offre avec plus de cellules face à un F-35 au coût unitaire bien plus élevé. Trop contraignant sur le plan technique, avec une liberté de négociation restreinte, Dassault semblait prêt à jeter l’éponge.
Cependant, l’appel d’offre étant lancé sous l’égide d’un RFGP, c’est le gouvernement français qui a pris la décision, assez tardivement semble-t-il, de répondre à la demande belge avec l’aide de Dassault, plutôt que le contraire.
C’est par une lettre adressée à son homologue belge que la ministre des Armées Florence Parly a annoncé la volonté de la France de fournir 34 Rafale à la Composante Aérienne belge. Face au positionnement américain, les autorités françaises ont donc décidé de contre-attaquer sur le terrain politique en proposant un partenariat stratégique de premier ordre, suffisamment profond pour secouer dans ses fondations la proposition américaine. Pour la ministre, il s’agit d’un « partenariat structurant, qui pourrait prendre la forme d’un accord intergouvernemental, comprendrait la fourniture de l’avion de combat Rafale, mais aussi une coopération approfondie entre [les] deux armées de l’air dans les domaines opérationnels, de formation et de soutien, ainsi qu’une coopération industrielle et technique impliquant des entreprises des deux pays”. Reste que, pour l’instant, la validité légale de l’offre française n’est pas assurée, l’offre étant actuellement soumise à analyse auprès des services ministériels.
Peu de détails du partenariat sont pour l’instant connus. Les forces belges et françaises disposent depuis 2004 d’une structure d’entrainement commune, les Alpha Jet français et belges servant à la formation des pilotes des deux pays depuis la base de Cazaux. Avec le retrait des appareils belges en 2019, cette coopération prendra fin et les pilotes belges seront envoyés en formation aux États-Unis. Néanmoins, après plus d’une décennie, cette coopération a soudé des liens entre les deux forces aériennes et établi un précédant que la France pourrait alors étendre aux pilotes de combat. En cas de sélection du Rafale, les pilotes belges pourraient ainsi bénéficier des infrastructures de formation existantes en France, mais aussi déployer régulièrement une partie de leurs appareils en France afin de profiter de zones d’entrainement très vastes. Un accord de défense mutuelle sera certainement établi afin d’assurer un libre passage des chasseurs d’un côté à l’autre de la frontière, mais aussi pour établir des synergies sur le plan de l’entretien et de la formation, sur le modèle de ce qui est déjà établi autour de l’hélicoptère NH-90.
Le volet industriel du partenariat pourrait également être particulièrement développé. Alors que le F-35 et le Typhoon disposent déjà d’un réseau de fournisseurs établis, offrant peu de place à l’industrie belge, l’offre française reposerait sur un mystérieux Rafale + qui reste à développer, sans qu’il ne soit précisé s’il s’agit du standard Rafale F4, d’une version spécifique au marché belge, ou d’un nouveau standard unique qui serait co-développé entre la France et la Belgique pour remplacer le Rafale actuel dans l’offre commerciale de Dassault. Il est également probable que l’offre française propose actuellement plusieurs possibilités et que les prochains mois de négociation devraient permettre d’affiner en fonction des desiderata et des ambitions politiques belges.
L’achat de Rafale aux standard actuels, ou au standard F4, devrait permettre de respecter sans trop de difficulté l’enveloppe budgétaire définie pour l’appel d’offre, voire même de s’équiper d’une bonne quarantaine de Rafale, en fonction du package sélectionné par la Composante Air. Dans ce cas-là, si l’offre française éveille un peu moins les fantasmes des aviateurs belges que les plaquettes marketing de Lockheed-Martin, elle permettrait tout de même à bien plus d’entre eux d’accomplir une carrière de pilote de combat. Dès ce mois-ci, les discussions devraient reprendre en France entre les industriels du GIE Rafale (Thales, Safran, Dassault) et les autorités françaises à propos de la définition du format F4. En cas d’accord belge, il y aurait alors de quoi inclure les positions de la Composante Air dans la définition de tout ou partie de ce standard. La désignation “Rafale +” évoquée par la ministre des Armées pourrait alors être une version du Rafale F4 intégrant les besoins, mais aussi les moyens de la Belgique, si c’est bien de cela dont il s’agit. Pour l’industrie française et Bercy, un tel partenariat autour d’un standard F4 “belgisé” serait une aubaine à l’heure des réductions –par ailleurs très discutables– des livraisons françaises, permettant de continuer à alimenter les chaînes d’assemblage de Dassault tout en partageant le financement (et les retours sur investissement) de l’évolution technologique du Rafale. Dans tous les cas, il s’agit bien pour la France de proposer un Rafale à un standard supérieur au F3R actuellement commercialisé, et ce afin de développer rapidement un standard adapté aux problématiques d’hyper-connectivité des avions de prochaine génération, ce qui couperait alors l’herbe sous le pied à une grande partie des arguments commerciaux de Lockheed-Martin. En effet, en tant que partenaire stratégique des USA, au même titre que le Royaume-Uni, la France est impliquée dans la définition des standards et des procédures qui sont appliquées, et imposées, par les États-Unis, mais la restriction des budgets de développement, d’équipement et de modernisation ne lui permet pas de maintenir à niveau l’ensemble de sa flotte de manière continue. L’implication d’une autre nation européenne dans le programme Rafale permettrait alors de dégager de nouvelles marges de manœuvre en ce sens.
L’autre option évoquée pourrait correspondre à un Rafale de nouvelle génération, matériellement différent du F3R et F4, ce qui reviendrait à intégrer la Belgique au développement du futur standard du Rafale, avec d’énormes retombées pour l’industrie locale, mais aussi un bon moyen pour Dassault et l’Etat français de pérenniser le Rafale à l’heure où se dessinent les futurs systèmes de combat aériens européens, pilotés ou non. Cette option n’est pas la plus réaliste, considérant le calendrier de livraison défini par l’appel d’offre, mais il n’est pas à exclure que la France propose une livraison d’avions standard dans un premiers temps, avant une mise à niveau ou un échange vers la nouvelle génération de Rafale. C’était d’ailleurs l’option initialement envisagée lors de la compétition OTAN, les Mirage F1 devant être livrés sans commandes de vol électroniques ni certains autres équipements, avant d’être mis à niveau quand les composants seraient prêts. Certes, à l’heure actuelle, cette solution ne semblerait pas financièrement et opérationnellement viable, mais elle pourrait bien être proposée comme “option haute” parmi un panel de propositions plus ou moins ambitieuses pour la Composante Air, en fonction du rôle qu’elle compte jouer parmi ses homologues du continent.
Car au-delà du partenariat stratégique que la France propose à la Belgique, c’est bien le futur de l’Europe de la défense qui est évoqué, et notamment le rôle que pourrait jouer Dassault, le Rafale, la France et donc l’éventuel partenaire belge dans la définition du futur système de combat piloté européen. La France et l’Allemagne se sont récemment rapproché afin d’étudier la possibilité d’un programme commun pour remplacer Rafale et Typhoon, sans qu’il ne soit décidé si l’éventuel futur vecteur soit un nouveau design ou basé sur un appareil existant, le Rafale devenant alors un choix logique. Évoquée entre les murs depuis quelques années, mais plus ouvertement affichée ses derniers mois, l’étude d’une version agrandie mais aussi plus discrète du Rafale pourrait également être lancée, avant tout afin de satisfaire les besoins en pénétration stratégique de l’Armée de l’Air, même si un tel appareil pourrait fournir une excellente base à un concurrent européen du F-35.
Dans tous les cas, il ne sera pas possible, pour la France, de financer parallèlement trois programmes d’avions pilotés, même s’ils étaient tous basés sur le Rafale, en plus du FCAS franco-britannique. Si un partenariat stratégique venait à être signé avec la Belgique, il pourrait alors servir de cadre au développement d’un tout nouveau vecteur, ou au moins aux systèmes embarqués de ce dernier. Pour Florence Parly, le partenariat franco-belge « contribuerait au renforcement de l’Europe de la Défense et de son autonomie stratégique, à une période où celle-ci est plus que jamais nécessaire ».
Il n’est donc pas impossible d’imaginer l’achat de Rafale+, un standard F4 approfondi avec la Belgique, et une participation des bureaux d’études et des industriels belges au développement du futur système de combat aérien européen aux côtés de la France, comme une récompense sans obligation d’achat, et sans contrevenir non plus aux réglementations européennes sur les offsets dans les contrats intraeuropéens. La valeur accordée aux enjeux européens, qu’ils soient militaires ou industriels, à court, moyens ou long termes, devraient en tous cas être prépondérant dans l’offre française.
En effet, à l’heure où la Russie représente à nouveau une menace pour le continent, et avec un Président américain à la fiabilité plus que douteuse concernant les affaires européennes, le moment pourrait être bien choisi pour appeler à un revirement de la politique étrangère belge. C’est en tous cas ainsi qu’est perçue la proposition française dans une certaine presse spécialisée, en France comme en Belgique, qui doutent du succès d’une telle opération diplomatique. En effet, nonobstant le fait que la présence même de Donald Trump à la Maison Blanche créée un précédent dangereux, et semblant oublier la profondeur de l’empreinte du régime de Poutine sur la conduite des affaires russes dans cette première moitié de siècle, ces observateurs que nous qualifierons de “positifs” s’appuient sur le fait que Donald Trump n’est pas éternel, tandis que le futur avion de combat belge servira au-delà de 2050, quand les affaires transatlantiques auront depuis longtemps repris leur cour normal, si tant-est que cela puisse encore dire quoi que ce soit.
Dans une telle vision à très long terme, la meilleure stratégie pour la Belgique serait alors de multiplier les partenariats stratégiques. En juin dernier, les ministres de la défense belge et français ont signé une déclaration d’intention autour du programme d’armement terrestre Scorpion, la Belgique désirant participer au programme sur le long terme, avec plus d’un milliard d’euros d’achat de véhicules. Après un tel partenariat déjà accordé à la France, il serait logique de voir le futur investissement majeur de la défense belge se tourner vers les États-Unis, les Pays-Bas et le reste de l’OTAN. Tout revirement en faveur du Rafale serait alors perçu comme un changement de cap de la politique étrangère belge qui passerait d’une vision défensive de l’Europe basée sur la puissance de l’OTAN à une vision défensive de l’Europe basée sur les alliances inter-étatiques au sein de la communauté, socle fondateur pour une future défense européenne intégrée, tant sur le plan militaire qu’industriel.
Si un tel changement semble difficile à envisager, il reste cependant loin d’être négligeable. D’une part, il ne faut pas oublier qu’un tel revirement a déjà eu lieu dans le passé, quand la commande de Mirage F1 a été annulée au profit d’une participation à l’appel d’offre de l’OTAN pour l’achat de F-16. Ensuite, l’opinion publique, la classe politique mais aussi les cadres militaires ne sont pas unanimement en faveur du F-35, qui voit son aura perdre de sa splendeur depuis quelques années.
En effet, le F-35 est perçu à juste titre comme un appareil extrêmement coûteux, particulièrement face au Rafale. De plus, ce qui en fait sa force sur le plan militaire pourrait bien s’avérer être une faiblesse sur le plan politique. Il y a peu de chances que le contrat pour un nouvel appareil soit signé avant juin 2018. Or, après cette date, la Belgique entrera dans une année électorale et le coût du F-35 tout comme la symbolique interventionniste pro-américaine qui lui est accolée rendra l’achat d’un tel appareil virtuellement impossible avant la prochaine investiture. A ce moment-là, le choix de l’appareil de combat dépendra en partie de la coalition qui aura remporter les élections. L’opposition actuelle, notamment le PS et les écologistes sont très dubitatif sur le bien-fondé d’un tel achat, certaines voix s’élevant contre tout investissement majeur, d’autres dénonçant plus spécifiquement le choix du F-35.
Dans ce cadre-là, le choix du Rafale pourrait s’avérer tout à fait pertinent, tant en raison de ses qualités techniques que de son coût ou de l’opportunité économique que représenterait le partenariat stratégique avec la France.
Nous l’avons déjà évoqué plus haut, le choix du Rafale serait également un message politique fort pour une Europe de la défense, particulièrement depuis que la France est devenue la première puissance militaire de l’Union après le Brexit. Pour le professeur André Dumoulin, spécialiste belge des questions de défense interrogé dans le dernier hors-série de Défense & Sécurité Internationale[3], la participation belge au programme Scorpion peut être vue comme une volonté de la part de Bruxelles d’intégrer le cercle restreint des nations européennes volontaristes en matière de développement d’une Politique de Sécurité et de Défense Commune, aux côtés de la France et de l’Allemagne, notamment. Une telle volonté n’est pas incompatible avec la poursuite de liens étroits avec les USA, l’OTAN ou les Pays-Bas qui découleraient de l’achat du F-35, évidemment, mais elle montre que le positionnement géopolitique belge n’est pas unidirectionnel, et qu’il s’agit encore d’une question éminemment politique qui pourrait être amené à évoluer dans une direction ou dans une autre d’ici les prochaines élections de 2019.
Eurofighter Typhoon : l’outsider ?
Après le Brexit, avec la montée de la menace russe et les signaux contradictoires envoyés par l’administration Trump, auxquels viendraient s’ajouter les prochains (inévitables ?) déboires du programme F-35, un échec du champion de Lockheed-Martin n’est pas à balayer du revers de la main. Mais si le choix se porte, politiquement, vers une option européenne, pourquoi est-ce que cela favoriserait le Rafale et pas l’autre compétiteur officiel, l’Eurofighter Typhoon ?
Pour la plupart des observateurs français et belges, le Typhoon fait en effet office de challenger, de lièvre pour amener Lockheed-Martin à ne pas trop gonfler ses prix. Pire encore, certains rappellent que l’offre Britannique met en première ligne l’industriel national BAE Systems, le groupe aéronautique national qui porte l’offre industrielle pour le Typhoon mais qui est également partie prenante dans le programme concurrent F-35… De quoi soulever des questions sur la validité de l’appel d’offre, eu égard aux réglementations européennes contre les conflits d’intérêts et le monopole des marchés. Mais les chances du consortium européen sont-elles vraiment nulles ?
Il convient de rappeler que, à l’heure où nous écrivons ces lignes, le Rafale n’est pas encore un candidat reconnu pour l’appel d’offre belge. En cas de rejet de la candidature française pour vice de procédure, tous les espoirs européistes reposeraient sur le Typhoon. Et, dans les faits, le chasseur européen présente certains avantages non-négligeables, malheureusement rapidement rattrapés par la réalité.
En premier lieu, et le consortium Eurofighter insistera grandement là-dessus, le Typhoon est produit par quatre nations européennes, l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne et le Royaume-Uni, et il sera proposé à la Belgique d’intégrer le tissu industriel continental créé pour l’industrialisation de l’appareil. De quoi nouer des liens étroits avec bon nombre d’industriels. Malheureusement, le Typhoon est un appareil en fin de développement, voire même en fin de vie s’il ne trouve pas d’autres clients après les dernières livraisons au Koweït, les budgets qui auraient pu être alloués au programme pour en faire un véritable avion polyvalent ayant été en grande partie investis dans les participations britanniques et italiennes au F-35. Certains équipements structurant restent éventuellement à développer et à intégrer, comme des réservoirs CFT, le radar AESA ou, plus improbable, des tuyères orientables, mais il s’agirait d’une charge de travail relativement modeste qu’il faudra répartir entre un nombre important de partenaire, loin, très loin des synergies attendues dans un partenariat bilatéral avec la France pour la définition d’un tout nouveau standard du Rafale.
Ensuite, le Typhoon représente la première ligne de défense aérienne de l’Europe, l’appareil étant le chasseur moderne le plus répandu, quantitativement, sur le continent. Les appareils belges pourraient alors s’entraîner régulièrement aux côtés de leurs collègues allemands, entre autres, à l’instar de la coopération proposée par la France. En opérations extérieures, les Typhoon belges pourraient alors bénéficier de l’expérience et de la logistique de leurs équivalents Anglais ou Italiens, pour ne citer que ceux qui seront le plus susceptibles d’être envoyés combattre à l’étranger.
Le Typhoon bénéficie également d’un vaste panel d’armements intégrés grâce à sa nature multinationale, avec de nombreux types de missiles air-air et, à terme, la capacité d’emporter des bombes à guidage laser, des missiles anti-char Brimstone 2 et des missiles stand-off SPEAR 3 sur des emports multiples. Ce type d’armements présente de sérieux avantages pour un usage continental, tant pour contrer une éventuelle attaque mécanisée que pour saturer des défenses sol-air intégrées, tout en étant suffisamment polyvalents et légers pour servir dans des missions de soutien aérien rapproché en opérations extérieures, y compris en zones urbaines. Malheureusement, malgré ce que disent les plaquettes de BAE Systems, ce grand panel d’armement pourra difficilement faire une grande différence. Certes, contrairement au Rafale, le Typhoon a déjà intégré les AIM-9 et AIM-120 en service en Belgique. Mais l’intégration des bombes JDAM, de certaines bombes à guidage laser lourdes ou encore des bombes légers SDB n’est pas encore actée pour le Typhoon, loin s’en faut. A cela vient s’ajouter la question nucléaire, déjà évoquée plus haut.
Enfin, un argument à double tranchant en faveur du Typhoon : son optimisation pour les missions défensives. De par sa conception d’intercepteur adapté à minima pour les missions d’interdiction, le Typhoon est un pur produit de la Guerre froide. Physiquement, l’appareil ne sera jamais capable d’emporter les mêmes charges lourdes qu’un Rafale, et il ne disposera jamais de la même autonomie que l’avion de Dassault ou le F-35 d’ailleurs. L’emport de missiles de croisières, ou même de bombes lourdes GBU-10/24 se fait inévitablement au prix d’un emport en carburant minimal. Cela limitera de facto les capacités de frappe lourde de l’avion en opérations extérieures, d’une part face au F-16 actuels, ce qui est déjà fâcheux, mais également face au F-35 et au Rafale. Or, dans le cadre de ses déploiements au Levant, en Libye ou en Afghanistan, les appareils belges ont à de multiple reprise mener ce genre d’attaque à coups de GBU-24 ou de JDAM. Par contre, sur le théâtre européen, mais aussi dans une certaine mesure en OPEX, l’utilisation de missiles Brimstone 2 ou de SPEAR 3, mais aussi en air-air d’un nombre important d’AMRAAM ou de Meteor, permettra à la Belgique de jouer un rôle solide dans des opérations défensives de grande ampleur, qu’il s’agisse de la défense des pays baltes ou d’une réaction à une éventuelle agression russe. Néanmoins, le SPEAR 3 devrait être intégré au F-35, tandis que le Rafale pourrait bien se voir doté d’un armement équivalent, qu’il s’agisse d’une version allégée de l’AASM ou de la future SmartGlider de MBDA… et ce sans perdre toutes les capacités de frappe lourde.
Ainsi, le choix du Typhoon renforcerait la position défensive de la Belgique, un argument qui serait alors bien plus politique qu’opérationnel. Avec un avion moins bien adapté pour accompagner les Américains ou les Français dans des aventures interventionnistes et plutôt optimisé pour la défense aérienne et aéroterrestre du territoire continental de l’Union Européenne, le Typhoon pourrait alors marquer des points sur la scène politique, toujours en fonction des résultats électoraux de 2019, si le choix pour le futur avion n’est pas fait d’ici là. Seule ombre au tableau ? La proposition gouvernementale envoyée à la Belgique ne l’a pas été par l’Allemagne ou l’Italie, mais par le Royaume-Uni. Pas le partenaire le plus optimal pour mettre en avant la Politique de Sécurité et de Défense Commune maintenant que le Brexit est acté.
Au final, les chances du Typhoon ne sont pas nulles. L’appareil européen pourrait bien profiter d’un manque de compromis politique en faveur de la proposition française ou de la proposition américaine pour se positionner comme une solution intermédiaire capable d’obtenir un consensus de dernière minute. Même si les mécanismes démocratiques s’avèrent très différents entre les deux pays, le choix politique du Gripen par les autorités suisses l’avait été dans un cadre similaire, avant d’être débouté par voix populaire.
Quelle vision belge pour l’Europe de la Défense ?
À travers le choix de son futur avion de combat, c’est bien la question de la place de la Belgique dans la défense européenne qui se profile. Les questions de politique de défense européennes ne seront pas forcément primordiales dans le processus décisionnel, puisque les critères techniques et opérationnels, mais aussi les enjeux industriels locaux, seront bien évidemment déterminant. Mais quelle que soit l’importance des facteurs politiques dans le choix de l’appareil, la sélection d’un type d’avion plutôt qu’un autre aura nécessairement un impact sur la façon dont la Belgique s’intégrera dans une défense européenne commune. Car chaque appareil permet effectivement de s’intégrer dans une vision communautaire de la défense européenne.
Le choix du F-35 conduirait évidemment à perpétuer une vision atlantiste de la défense européenne. Alors que la fin de la Guerre froide et le démantèlement du Pacte de Varsovie avait conduit certains experts européens à envisager la fin de l’Alliance Atlantique et l’émergence d’une véritable Europe de la défense, force est de constater qu’il ne s’agissait alors que de vœux pieux, et que la protection à l’échelle régionale de l’Europe occidentale repose encore aujourd’hui principalement sur l’OTAN, qui s’est agrandie largement vers l’Est. D’un point de vue pragmatique et réaliste, à l’heure d’une remontée en puissance russe, s’appuyer à nouveau sur la puissance américaine et celle de l’OTAN apparaît comme un choix raisonné. D’autant plus que la quasi-totalité des OPEX qui voient intervenir les chasseurs belges sont coordonnées par l’OTAN, ou par une coalition de pays membres de l’OTAN qui en reprennent les modes opératoires et les règles d’engagement. Il n’empêche que la politique de Trump, aussi passagère puisse-t-elle être sur le long terme, a montré que les Américains ne constitueraient pas toujours un rempart face à la menace de la Russie de Poutine, d’autant plus que les liens entre les deux présidents semblent pour le moins ambigus à l’heure actuelle. De plus, une administration Trump qui irait à terme, ou pire encore qui se verrait rempiler pour quatre années supplémentaires, pourrait bien marquer le début d’un phénomène de déclassement rapide de la posture américaine sur la scène internationale. Avec l’émergence des puissances régionales, la montée en puissance économique russe, les printemps arabes de 2011 et la crise économique de 2008, l’hégémonie américaine en Europe et au Moyen-Orient avait déjà été mise à mal sous la présidence d’Obama, dont le pivot asiatique reposait en grande partie sur la capacité de l’Europe à assurer sa propre défense. Une volonté réitérée par l’administration Trump lors du dernier sommet de l’OTAN en Belgique, justement.
Au-delà de la question atlantiste, le choix du F-35 permettrait de prolonger le partenariat stratégique entre les forces aériennes belges et néerlandaises. Les partenariats bilatéraux forment en effet, aujourd’hui, la base des accords de défense au sein de l’Union Européenne. A bien des égards, et même si elle émerge d’une volonté d’économie plus qu’autre chose, l’intégration extrêmement poussée des forces aériennes belges et néerlandaises représente un exemple réussi où les intérêts communs ont primé sur les intérêts nationaux, et où la fusion des moyens techniques et des modes opératoires a conduit au développement d’une politique étrangère commune, au moins sur les questions d’interventions extérieures, qui restent cependant plus arbitrées par la politique de l’OTAN que par celle de l’Union Européenne.
Le choix du Rafale, principalement dans le cadre du partenariat intergouvernemental évoqué par Florence Parly, conduirait à une plus grande intégration des politiques étrangères belges et françaises, mais aussi au renforcement de la position belge dans la construction d’une politique de défense commune, qui pourrait bien enfin décoller dans la décennie en cours après avoir stagné depuis le début des années 1990. L’intégration de la Belgique au programme Scorpion, tout aussi stratégique pour les forces belges que le renouvellement de sa flotte de combat, est un marqueur fort qui va déjà dans ce sens. Le développement de la défense européenne commune ne se fera pas avec les 27 partenaires, qui n’en ont pas tous les moyens ni la volonté, tandis qu’en même temps elle ne peut pas se limiter aux seuls membres de l’Union (à bien des égards, une coordination poussée avec le Royaume-Uni, mais aussi la Suisse et la Norvège, est essentielle aux enjeux sécuritaires de l’Union et de ces pays hors-Union). La constitution de l’Europe de la Défense politique et industrielle devra donc se faire à plusieurs vitesses, certaines nations prenant le leadership en constituant des initiatives multilatérales tant sur le plan des structures organisationnelles que des programmes industriels, en espérant pouvoir intégrer par la suite de nouveaux partenaires. Dans ce cadre, la France cherche à revendiquer un statut privilégié, celui de première puissance militaire de l’Union Européenne, depuis le Brexit, celui de premier contributeur aux opérations conjointes, mais aussi celui de seule puissance nucléaire de l’Union Européenne, garantissant un parapluie défensif pour ses voisins. La question du financement par l’Union d’une partie du budget de la défense française est ainsi de plus en plus régulièrement évoqué, tant par des chercheurs et analystes que par des militaires ou des hommes politiques. Avec le risque isolationniste américain, et le retrait de l’Union du plus grand allié de Washington, non seulement l’Europe va devoir penser sa défense seule, mais en plus elle va pouvoir s’en donner les moyens politiques, maintenant que le veto britannique n’est plus possible. Or, la France reste à l’heure actuelle la seule force militaire crédible de l’Union, la seule structure qui pourrait servir de base à la création d’une force européenne.
Et c’est bien dans ce cadre-là que s’inscrit la proposition française, qui propose de continuer dans le secteur aéronautique le partenariat développé dans le domaine terrestre avec Scorpion, offrant un tremplin à la Belgique pour participer activement en tant que nation cadre à la construction de cette défense européenne à plusieurs vitesses. Les pays qui en ont la volonté et les moyens doivent se regrouper pour construire un avenir commun. Ceux qui font le choix ou sont dans l’obligation de temporiser pourront certes suivre les pays précurseurs, mais s’en en retirer tous les avantages opérationnels et économiques.
Cependant, la crédibilité de l’offre française repose sur sa capacité à assumer et revendiquer pleinement son statut de première puissance militaire européenne. Cela demandera au nouveau gouvernement à la fois de donner aux armées les moyens matériels d’asseoir leurs revendications, mais aussi d’obtenir clairement la reconnaissance politique du statut français auprès des partenaires et institutions de l’UE. Les atermoiements récents du gouvernement à propos du financement des armées et des OPEX et les prises de positions désastreuses du président Macron au mois de Juillet donnent cependant une image très bancale des ambitions françaises face au volontarisme discret mais bien réel de l’Allemagne ou même de la Pologne. Alors que la Pologne, première force armée terrestre de l’Union Européenne, fait clairement le choix du rapprochement avec les USA et de la cohésion de l’OTAN, l’Allemagne pourrait belle et bien prendre la place laissée vacante depuis le Brexit aux côtés de la France, au point de devenir la première puissance militaire du continent d’ici la fin de la décennie, au moins en terme de budget.
Si la France prend ses responsabilités d’ici l’horizon 2025, le couple politique franco-allemand pourrait bien devenir le moteur de l’Europe de la Défense, avec une poignée de pays actifs et motivés pour créer une réelle dynamique. Si l’Eurofighter Typhoon avait été proposé par l’Allemagne, on pourrait imaginer que le choix de l’un ou l’autre appareil aurait eu, pour la Belgique, un impact relativement similaire sur son introduction au sein de ce cercle fermé de nations proactives dans la construction d’une Europe de la Défense politique et industrielle.
Avec un Eurofighter proposé par le gouvernement britannique, et à l’heure où la France est le seul pays de l’Union apte aussi bien à sa défense territoriale qu’à la défense de ses intérêts en opérations extérieures, il semble bien que la bataille politique pour l’équipement de la Composante Air et, par effet de bord, de l’Europe de la Défense, se fera entre le F-35 et le Rafale, laissant le Typhoon comme solution de compromis, de non-choix, plutôt que comme solution d’adhésion. Si la proposition française était déboutée, le F-35 aurait alors un boulevard devant lui, que les citoyens belges paieront sans aucun doute au prix fort.
[1] http://www.lalibre.be/economie/libre-entreprise/dassault-renonce-au-remplacement-de-nos-f-16-par-ses-avions-rafale-59b02db9cd703b65922ee05f[2] Même si cela relèverait d’une certaine hypocrisie, la France peinant elle-même à conserver son statut d’armée de second rang, dans certains domaines.
[3] André Dumoulin, « PSDC, une fenêtre d’opportunité ? », DSI Hors-Série n°55, Août-Septembre 2017
35 Comments
Wako
bonjour, des précisions sur cette évolution de la cellule du rafale, plus grand et plus furtif ?
Merci !
Yannick SMALDORE
L’idée n’est pour l’instant qu’évoquée, mais il s’agirait d’avoir une cellule plus longue adaptée à l’emport de l’armement nucléaire qui succèdera à l’ASMP-A, et qui devrait être à la fois plus lourd et plus long que son prédécesseur.
Tant qu’aucune demande officielle n’a été formulée par nos armées (si cela arrive un jour), il ne sera pas possible d’en dire plus, ou alors ce ne serait que conjonctures.
Wako
Merci, j’avais vu ça j’aurai aimé qu’il soit aussi plus large histoire d’avoir un soute entre les deux réacteurs… Des capteurs noyés dans la peau, ca aurait réduit sa SER à peu de frais.
Rémi
Excellent article, très bien documenté.
“un Président américain à la fiabilité plus que douteuse concernant les affaires européennes, le moment pourrait être bien choisi pour appeler à un revirement de la politique étrangère belge.” : Oui, c’est vraiment le moment pour les pays européen de remettre sur la table la question de rester intégré à l’OTAN qui revient à choisir le camp américain ou devenir un contre-pouvoir neutre vis-à-vis de russes et américains. N’a-t-on pas notre propres intérêt ? Depuis la fin de la IIe guerre mondiale, on défend les intérêts américains, peut-être cela suffit-il… On aurait déjà dû se poser cette question lorsque le bloc de l’est s’est effondré. Grave erreur : on a isolé les russes et cela a créé Poutine.
Wako
Poutine était là avant qu’on isole les russes et il n’y avait pas de problème avec lui.
Par contre le monde a eu des problèmes avec Obama, Bush, Clinton …
a vous de conclure…
Rémi
Ben, faut étayer… On ne comprends pas bien ce que veut dire “Poutine était là avant qu’on isole les russes”. Il est bien arrivé au pouvoir après Gorbatchev et après Ieltsine. Donc après que le bloc communiste s’effondre ?
Ce que je voulais dire c’est qu’on aurait dû dissoudre l’OTAN.
Les avionneurs européens (et les autres industries), auraient dû réfléchir à plus collaborer avec les russes. C’était un énorme marché.
Je me souviens en 89, pour moi, c’était prometteur… Je me trompais.
Ben oui, le monde a eu des probèmes avec Obama, Bush, Clinton, … Mais aussi avec Sarkozy, De Gaulle, Merkel, Hiro-Hito, Napoléon, Gengis Khan… On ne voit pas très bien le rapport. C’est un peu hors propos, non (sans vous vexer) ? Ou alors, je n’ai pas bien compris votre discours.
Wako
je veux dire que Poutine ne poussait pas de problème pendant de nombreuses années. c’est peut être que le problème ne vient pas de lui. Jamais un pays n’a aligné à la suite des dirigeants problématiques que les US.
Oui l’OTAN aurait dû être dissoute.
Si vous comprenez pas après ça, je peux rien pour vous (sans vous vexer).
Rémi
Ah ben là, je suis mouché… ;-D
thierry11
Absolument remarquable votre article, très complet, bravo !
Nico
Bravo pour cet article remarquable !
J’ai beaucoup appris à sa lecture.
petitmarmotin
Très bon article ! Une petite erreur cependant : le F-35 est loin d’équiper la force aérienne du Canada, l’annonce que le département d’Etat américain a approuvé la vente de 18 F/A-18E/F Super Hornet au Canada laissant de plus en plus penser que le Canada n’a toujours pas décider quel appareil il achèterait pour remplacer ses vieillissants CF-188, malgré son implication dans le développement du F-35…
Yannick SMALDORE
Effectivement, ce n’est pas du tout une certitude, j’ai modifié l’article en fonction.
Après, et ce n’est que mon point de vue, je reste persuadé que les forces aériennes canadiennes vont drastiquement monter en puissance dans les deux prochaines décennies, à l’instar de ce qui se profile depuis un moment en Australie. A terme, je suis prêt à parier qu’ils auront une flotte articulée autour des Super Hornet “d’intérim” et de nouveaux F-35, une fois que ces derniers auront corrigés leurs défauts de jeunesse et stabilisé leur prix.
Mais c’est en dehors du sujet en effet, et l’article est corrigé. Merci de votre remarque 🙂
Arthur 25
Bonjour à tous ,je doit dire que la récente sortie de André Lanata sur le déclassement de la France à cause des autres pays s’équipant de f35 ne me rassure pas du tout, car je l’interprète comme un aveu de l’infériorité de notre rafale face au f35 . j’espère me tromper…
Yannick SMALDORE
Votre interprétation est celle de la plupart des commentateurs, y compris en Belgique, malheureusement.
Ceci étant dit, pour avoir déjà entendu le Général Lanata parler de ce sujet, je pense que ses propos ont été sortis de leur contexte. A mon avis, il ne craint pas le déclassement technique ni même commercial de la France. Il craint son déclassement opérationnel, qui serait moins provoqué par l’arrivée massive des F-35 chez nos alliés que par l’arrêt des livraisons des Rafale auprès des forces françaises, et les retards (et éventuelles restrictions budgétaires) du standard F4.
Le problème est vraiment là, et c’est ce qui motiverait encore plus la volonté de chercher des partenaires pour développer un Rafale+, une sorte de Rafale F4 musclé, qui arriverait dans les temps (les contraintes liées à l’exportation sont souvent mieux considérées par nos politiques que celles liées à la structure de nos forces, malheureusement) pour contrer le F-35 opérationnellement.
Sans cela, le risque serait de voir l’Armée de l’Air privée de la possibilité de rester une nation cadre dans les opérations extérieures, puisque ses avions ne seraient pas équipés des derniers standards en matière de communication, liaisons de données, outils de déconfliction etc.
La problématique était similaire au début des années 1990, quand l’exportation de F-16C et la modernisation des F-16A au standard MLU chez nos alliés rendait les Mirage 2000C “obsolètes” sur certains points, imposant l’achat d’une trentaine de Mirage 2000-5FR pour continuer à jouer dans la cour des grands, en quelque sorte.
Wako
il parle du déclassement de l’armée de l’aire française et non du rafale.
ainsi que du manque d’interoperabilité entre le F35 et tout les autres avions meme US.
Les US comme l’OTAN devront pondre un truc pour remédier à ca.
Le général pointe là la nécessité d’une pression politique pour qu’une solution soit trouvée.
Enfin il faut prendre cette déclaration pour ce qu’elle est, une déclaration politique devant des politiques. Les généraux US ont aussi souvent un discours du genre pour justifier d’une augmentation des moyens.
Arthur 25
Merci pour votre réponse Yannick.
Romain
Très bon article, un régal de vous lire. À noter concernant le Typhoon la commande ( surprenante d’un point de vue log. ) Du quatar au standard T3 et ce pays mettra le prix pour un développement complet ( aesa, réservoir conforme etc ) Peux être qu’avec ce rebondissement le Typhoon à plus de chance d’être sélectionné.
207 SW
Bonjour
207SW
Concernant l’avion Rafale signalé une petite erreur au chapitre Bis Repetita Place serait
que le Rafale dans le version F3R n’aura pas la nacelle Damocles,mais la nouvelle nacelle Talios qui entrera en service en 2018 avec beaucoup de possibilités inédites idem pour sont nouveau radard et une amélioration de son système Spectra très innovant.
De manière plus générale je pense que les Dirigents Belge on pensé a l’évolution
du F-35 dans les 20è30 années qui viennes car cet avion est très peu évolutif pour exemple:
une simple mise a jour coute tellement cher et complexe sur les avions produit que le constructeur ne l’ait fait pas ?
207SW
Je souhaite aussi vous parlé du parapluie Nucléaire des F-16 Belge,je pense que l’Amérique ne donnera jamais les codes sources d’armement des bombes même si vos intérêts vitaux sont jeux.D’ou l’importance maintenant de penser Européen pour un parapluie efficace car
il faut couper le cordon ombilical avec l’Amérique pour que l’Europe soit un partenaire pour
L’Amérique mais plus un Vassal.
Que l’Europe prenne sont destin en mains pour nous et nos Familles
George
bonjour à tous,
Suite à la lecture de l’article et des commentaires, je souahite ajouter ce qui suit
http://www.lesoir.be/117934/article/2017-10-06/la-france-garde-bon-espoir-de-vendre-ses-rafale-la-belgique
http://www.lalibre.be/actu/politique-belge/le-mr-refuse-d-enterrer-le-rafale-comme-remplacant-du-f-16-59d681bccd70be70bcd1e3d2
Dans les commentaires de la page proveant de air-defense, il y a une partie des questions posées http://www.air-defense.net/forum/topic/18726-la-composante-air-belge/?page=95.
Il y aussi une question dont on parle peu c’est celle de l’entretien des futurs avions.
Les Britanniques devront faire inspecter et réviser leurs f35 en Turquie.
La durée de l’entretien actuelle serait le double de ce qui est prévu.
https://www.theregister.co.uk/2017/10/19/f35_fighter_engines_turkey_overhaul/
https://www.theregister.co.uk/2017/10/30/f35s_grounded_by_spares_shortage/
broddin
Merci, votre article est tres complet et extremement iinteressant, il met en perspective les differentes options offerte a la Belgique.
Comme Belge de naissance, Europeen convaincu, passione d’aviation et ancien de l\aviation legere de l’armee de terre (rien a voir??), je vous communique ma position personnelle basee sur l’observation de l’evolution depuis le fameux marche du siecle.
A cette epoque, le F16 a ete la meilleure option, car cet avioon avait ete concu et impose aux Etats Unis a l’epoque ou le Colonel Boyd, malgre bien des difficultes et grace a des demonstrations achaarnees et convaincantes reussisse a l’imposer au Pentagone.
Il s’agissait a l’epoque de mettre en ligne un chasseur le plus manoeuvrable et le plus leger possible. La preuve de la reussite de ce concept, a ete donnee par l’avion lui-meme et ses multiples evolutions ulterieures jusqu’a ce jour.
A l’epoque, Dassault a developpe avec grand succes le Mirage 2000, qui lui aussi a bemeficie de nombreuses evolutions jusqu’a ce jour.
En ce qui me concerne, je crois fermement que la Belgique n’a que deux options acceptables, soit le Typhon Eurofighter, soit le Rafale de Dassault, pertsonnellement, je prends fermement position en faveur du Rafale, a cela je donne plusieurs raison, qui sont les suivantes:
Culture et formation des pilotes commune, memes avions, meme ecoles en France.
Le Rafale est un avion tres performant et tres versatile qui a fait ses preuves sur le terrain aux cotes de nos F16, avec une grande efficacite, et le Rafale n’est encore, comme le F16 a son epoque qu’au debut de ses evolutions possibles.
Le Rafale est Europeens, meilleur que le F35 (sans furtivite, mais a quoi sert celle-ci trois heures apres la premiere frappe) et la Belgique (Bruxelles) se pretend la Capitale de l’Europe, il me semble donc grand temps que les politiciens se remontent les bretelles et agissent en fonction de l’interet bie compris de la Belgique et de l’Europe qu’ils pretendent defendre.
On pourrait, bien sur, epiloguer et continuer a exposer bien d’autres raisons, mais ceci n’est pas l’endroit.
a bientot
BOBO
J’ai l’impression que mon compatriote belge de naissance n’est plus revenu au pays des frites depuis bien longtemps!! Ou alors tout simplement jamais. Sinon, il saurait que depuis 20 ans il existe une solide collaboration militaire tous azimuts avec la Hollande en matière de matériels militaires. (Frégates, chasseurs de mines, drones etc…)Or les hollandais se sont DEJA prononcés pour les F35. Ce serait étonnant que le lobby du nord (les flamands) perde cette confrontation contre le lobby du sud désargenté et minoritaire dans le pays!!
PS: je ne représente pas Locheed Martin 🙂
Lors de mon dernier post un de vos collègues suspicieux avait jugé mon avis très proche des russes 😉
BOBO
L’argument de l’intégration européenne menant au choix du rafale me semble un peu partisan. En effet, et vous faites illusion, pourquoi privilégier la France et Dassault qui ont prouvés déjà en abandonnant le projet européen de l’Eurofignter qu’ils sont incapables de compromis collectifs et qu’ils privilégient systématiquement leurs intérêts. Les frictions chez Airbus entre la volet allemand et français plaident dans ce sens aussi.
Si l’argument Européen devait être retenu, l’alliance de l’Eurofighter (Italie, Espagne, Allemagne…)semble donc bien plus appropriée.
L’axe franco-allemand me semble prématuré et l’expérience Airbus doit sérieusement refroidir ceux cis.
Belle analyse en tout cas, très complètes en tout cas.
tori
Eurofighter est un compromis collectif on voit ce que cela à donné. La faute à dassault ? merci à eux plutôt pour avoir su fuire cette idéologie d’une autre époque et ainsi préservé un savoir-faire indispensable notre indépendance.
Et en terme de coopération européenne militaire avec le NEURON à l’heure actuelle ils sont les seuls à avoir réussi à en mené un sans anicroche d’un bout à l’autre.
Bobo
Le ministre se la défense Belge Vandenput vient de qualifier l’offre francaise de trop belle pour être vraie. Il insiste aussi sur le fait qu’elle est faite en dehors de l’appel d’offre officiel. Vous imaginez les procédures juridiques si ce qui est peu probable le Rafale était choisi au détriment de ses concurrents??
Cette méthode est mal perçue au nord du pays. C’est comme si je décide de passer par la fenêtre parce qu’on ne m’one m’ouvre pas la porte. Bof….
En bon père de famille, la défense belge devrait choisir le f35 de 5 ème génération plutôt que l’Eurofighter qui vole depuis 20 ans ou le Rafale, hors course de par le non respect des procédures d’appel. Ces 2 avions sont déjà en milieu de vie.
Le rafale est certes un bon avion pour les pays émergents comme l’Égypte, le Qatar ou l’inde mais pas pour une nation europeenne de pointe ou il ne s”est jamais vendu.
Bobo
Une precision: la qualification de trop beau pour être vrai est liée aux compensations industrielles liée au projet. La France propose 20 milliard de compensation pour une facture de 20 milliards. C’est du jamais vu et le ministre insiste des lors sur le caractère irréaliste de l’offre faite en dehors des règle. Ah oui….les règles doivent être respectées. On nous martèle ce credo paerour mais il semble qu’en france…..:) hum…hum
Bobo
On pourrait critiquer l’appel d’offre belge trop favorable au F35. Aussi je rappelle que la Belgique est le siège de l’Alliance Atlantique en Europe et doit des lors maintenir ses capacités de défense et de cohérence politique vis a vos de ses partenaires. Vous immaginez le grand ecart si le pays dépositaire de la défense atlantique achetait français??? Et cela après que Trump soit venu leur tirrer les oreilles il y a moins d’un an parce que les pays se l’OTAN n’investissent plus dans leur défense et comptaient trop sur les états-unis. Politiquement ce serait indéfendable sauf dans un geste de defiance anti Trump. Mais il faudrait payer l’addition après. Ce que la Belgique ne peut se permettre après avoir inauguré zn juollet à Bruxelles le nouveau quartier général de l’OTAN.
Ce choix discutable de Paris de passer en dehors de l’appel d’offre est dès lors très compréhensible, mais quel sérieux y accorder dans le contexte pré-cité ???
Je crois que le peux de sérieux de l’offre française tant au niveau du respect de la procédure que des compensations industrielles irréalistes proposées démontrent au possible qu’a Paris on n’y croit pas trop non plus. Cela qui expliquerai beaucoup de choses 😉
Bobo
De quoi alimenter la discussion
https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_quel-avion-pour-remplacer-le-f-16?id=9833484
Bobo
Improbable rebondissement dans cette saga, la Belgique est actuellement sens dessus dessous sur la question du remplacement de sa flotte de F16. D’après un rapport secret qui a été caché par quelques généraux ambitieux au ministre des armées, Lockheed-Martin pourrait prolonger la durée de vie des cellules des f16 belges de 6 années. Gros scandale politique dans le royaume en cours, la procédure de désignation du F35 est gelée, les cartes sont redistribuées. Une bonne histoire belge de plus, et peut être une bonne nouvelle pour Dassault Rafale? A suivre!
Bobo
Et voilà encore une belle histoire belge….apres tout ce bordel, lockheed-martin est venu dire qu’il n’était pas possible de prolonger la vie des f16 belges sans de grands frais.
On va sans doute reprendre la commande Us du F35 et Basta. Surtout que Trump vient encore de taper sur la table concernant les dépenses insuffisantes en materiel des pays de l’OTAN. Et comme par hasard, il a bien pointé l’Allemagne qui doit aussi renouveler ses vieux tornados.
Il ne faut pas oublier que Trump vient su monde des affaires. Perso, à part son coût, le F35 reste la meilleure alternative. L’Eurofighter et le rafale sont des avions en milieu de vie. La rafale est un bon investissement pour bombarder les pays du tiers monde mais n’a pas sa place dans une guerre moderne électronique contre la Russie.
tori
D’un point de vue opérationnel le choix du F-35 pour la belgique est une absurdité, qui ne peut s’expliquer que par des raisons de choix diplomatique ou de corruption.
Absurdité car les coûts d’usages du F-35 sont rédhibitoire pour le budget de la belgique. Un partenariat avec les pays-bas semble se dessiner , la encore mieux vaut panacher avec un autre appareil , c’est le point de vue adopté par les USA, le royaume-uni … . La doctrine du tout F-35, l’avion ultime, est morte.
Le F-35 est avant tous un outil belliqueux , pour se défendre les choix de la suisse pays géographiquement très similaire à la belgique sont plus cohérent.
Comme je le développe ci-dessous le choix du F-35 c’est une décision diplomatique lourde de sens.
tori
Le choix du F-35 c’est l’abandont de toutes indépendances militaires à un degrés jamais vu. Le système de maintenance ALIS moucharde et soumet toutes opérations de défenses ou d’attaque à l’Aval des USA.
Ainsi un pays qui adopte uniquement le F-35 s’engage à suivre les décisions géopolitiques des USA ,tous revers d’alliance provoque immédiatement une attrition des forces militaires.
Il n’y a pas de réciproque pour les USA au contraire même , se sachant à ce point vital ils peuvent se permettre de moins prendre en considération les intérêts de leurs “alliés” dans leur choix.
Bobo
Et voilà, Trump est encore venu geuler sur ses partenaires de l’ Otan a Bruxelles pour qu’ils depensent plus. Les commandes pour le F35 devraient normalement suivre pour au moins la belgique et l’Allemagne.
C”est qui qui est un génie stable…hahaha
Thomas Lefebvre
C’est superbe c’est splendide, quel beau boulot!
Des lectures intéressantes et motivantes !