L’organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne, ou EUROCONTROL, a publié son compte-rendu 2013 portant sur les statistiques de l’aviation militaire de tout un ensemble de pays européens membres de la Conférence européenne de l’aviation civile, et d’autres pays dont les Etats-Unis.
Le document (dont l’intégralité est disponible ici) est intéressant à plusieurs titres et fournit un bon instantané de l’activité aérienne militaire de l’année 2012, permettant de mieux cerner l’impact de tous les efforts de rationalisation opérés par les Etats depuis ces dernières années.
Parc aéronautique global : première hausse depuis 9 ans
Eurocontrol poursuit donc son travail de statistique et de comptage entamé depuis 2004, et est capable de tracer une évolution de l’activité aérienne militaire au cours de ces dernières années.
Premier constat : le nombre d’aéronefs d’Etat (militaires, officiels, protection civile, etc…), qui était en baisse constante depuis 2003, a connu une hausse légère en 2012.
Eurocontrol propose une explication possible à cette tendance à la hausse : il y aurait un chevauchement entre les avions d’anciennes générations et ceux de nouvelle génération, cette transition n’étant pas instantanée le parc global s’en trouverait augmenté.
Les Etats-Unis conservent leur place de leader avec environ 30% d’avions supplémentaires que les 44 Etats de l’ECAC réunis (en français, la Conférence européenne de l’aviation civile).
Ces chiffres permettent néanmoins de prendre conscience du poids qu’aurait une vraie Europe de la Défense en matière aéronautique.
D’ailleurs, le document fournit une liste descriptive complète du parc aéronautique militaire de tous ces pays. Ces données sont fournis par les Etats, et peuvent donc différer un peu de la réalité. Mais elles permettent de se faire une idée plutôt précise. A titre d’exemple, voici les aéronefs militaires recensés pour la France :
(RPA correspond aux drones, pour Remotely Piloted Aircraft)
Un trafic militaire général en baisse continue
Le trafic aérien militaire général, quant à lui
, poursuit sa baisse constante depuis 2003 : en 2012, il représentait 1.68% du trafic global dans les pays écoutés.
Précision importante : il s’agit du trafic GAT, pour General Air Trafic, dont la définition est la suivante :
“Tous les vols qui sont conduits en accord avec les règles et les procédures définies par l’OACI et/ou le service national de régulation et de législation de l’aviation“.
Pour ce qui est des vols OAT (Operational Air Trafic), les chiffres sont différents, et nous y reviendrons plus bas.
Ce sont 159137 vols qui ont été enregistrés au cours de l’année 2012, ce qui donne un moyenne de 442 vols par jour environ (GAT = General Air Trafic).
A côté de ces chiffres annuels, Eurocontrol fournit aussi le détail du trafic global (civil + militaire) en fonction des mois de l’année 2012.
On note la hausse d’activité du trafic civil en été, qui correspond aux périodes de vacances habituelles.
Quoi qu’il en soit, le trafic civil est très largement supérieur au trafic militaire, ce n’est pas une surprise.
Mais là où le document est particulièrement intéressant, c’est dans le détail qu’il donne pour les vols en fonction de l’aéronef :
Ce sont donc les avions de transport américains qui occupent les deux premières places : le C130 Hercules et le C17 Globemaster. L’aviation de transport militaire, souvent considérée comme “force tranquille” au sein de l’aviation militaire et discrète dans l’actualité, rappelle donc son rôle important et sa prévalence.
La troisième place est française, avec le Socata TBM-700, très utilisé par les forces françaises pour le transport d’autorités notamment.
Le premier avion de combat de la liste est américain, et c’est le F-18, qui totalise 2500 vols en 2012, suivi de près par le F-16 avec 2210 vols.
Du côté européen, l’Eurofighter totalise 1331 vols, en étant utilisé par plusieurs pays.
Les avions de combat de français ne sont pas dans la liste, moins de 1000 vols ont donc été réalisés en conditions GAT par chaque type d’aéronef français.
Au final, on obtient la répartition suivante concernant l’ensemble des vols militaires en GAT :
Presque 70% des vols pour l’aviation de transport militaire, un chiffre qui reflète le détail des vols par aéronefs.
De plus, ce chiffre est cohérent dans la mesure où le trafic GAT comprend essentiellement des vols de transit, en suivant des routes aériennes classiques. L’aviation de transport respecte donc ces règles générales de la circulation aérienne.
Enfin, pour finir, voici la répartition des vols par pays membres de l’ECAC :
Surprise, c’est l’Italie qui domine avec plus d’un quart des vols militaires de type GAT (General Air Trafic) réalisés par ses aéronefs. Les Tornado, Eurofighter et autres AMX de la Aeronautica Militare sont donc les patrons du ciel européen.
La France suit de près, et rattrape son retard de 2011.
Le même type de tableau est également disponible pour les pays non membres mais suivis par Eurocontrol :
Perspectives futures
Notamment, la question des coûts à l’heure pour faire voler à un aéronef militaire est importante, ces derniers ayant explosé au cours des années. Et Ils ne sont pas prêts de diminuer au regard de la complexification constante des appareils. Voici à titre d’exemple les coûts horaires moyens des avions de la Marine Nationale, donnés en 2006 par Air&Cosmos :
- Super-Etendard : 13000€/h
- Atlantique 2 : 18800€/h
- Rafale Marine : 39000€/h
- Hawkeye : 40300€/h
Reste donc à voir comment va évoluer la tendance générale de l’aviation militaire surveillée par Eurocontrol dans les prochaines années, même si on peut déjà se faire une bonne idée en suivant l’actualité : entre la “Séquestration” du budget militaire américain, le Livre Blanc de la Défense 2013 qui n’est pas tendre avec les forces aériennes françaises, l’échec de la construction d’une Europe de la Défense, et des coupes budgétaires massives pour la majorité des armées européennes, on imagine assez mal une inversion franche de la tendance.
Reste que ces chiffres permettent de dresser un rapide panorama de la situation de l’aviation militaire et de prendre un peu de recul sur l’actualité assez mouvementée du secteur.
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A propos de l’auteur :
JC Bijonneau est le fondateur et le principal rédacteur de Aerofan.fr, un site consacré à l’information aéronautique internationale, principalement centré sur l’aviation militaire et les drones.
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